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Mes vies parallèles de Julien Leschiera. La Dilettante. 💛💛💛

Voici un premier roman et un auteur qui risquent l’originalité , le sujet casse gueule et qui s’en sortent plutôt bien.
En troisième de couverture un avis laconique : Ce premier roman ne contient pas une once de bonheur, c’est un feel-bad book. Une couverture au graphisme noir et blanc représentant un poil dans la main.
Tout cela pour un livre de plus de 500 pages à la pagination serrée dans laquelle une aération due aux paragraphes est peu présente.
Avouez qu’il y a mieux pour inciter à la lecture d’un roman.
Et pourtant Julien Leschiera, libraire à Clermont-Ferrand va nous arrimer à son feel-bad book.
Première phrase du roman :D’aussi loin que je me souvienne, je n’ai jamais désiré autre chose que ne rien faire « 
La gageure de Julien Leschiera sera de surfer sur ce pitch très court. Et il tiendra la gageure.
Charles Dubois l’anti-héros de ce livre est un être avachi. Déjà intra-utérin le gynécologue avait prévenu les parents : votre bébé est mou et avachi.
Charles le sera toute sa vie. D’avachi il deviendra faineasse ou feignasse.
Charles est un oisif.
Charles Dubois est un anti héros flamboyant, exaspérant qui fuit la vie et la réalité. Il se raccroche à des vies parallèles dans lesquelles son avachissement est moindre.
Cet avachissement n’est pas un acte politique. c’est juste une façon d’être : tout faire pour passer inaperçu et être invisible au monde. Il pense qu’en s’oubliant on l’oubliera à son tour. Bien que maître dans l’art de ne rien faire le monde est loin de le laisser tranquille.
Il devra faire face aux affres des copains et des copines , aux affres d’une vie de couple pour la moins monacale et autarcique. Il fera aussi des expériences ratées, mais comment pouvait il en être autrement, auprès du monde de l’édition et des médias. Son oisiveté réussira même à lui faire traverser l’Amérique latine.
Contrairement au titre , les vies parallèles restent secondaires et c’est la multitude d’aventures qui prend le pas.
Cela peut être la limite du livre , car pour être un oisif de qualité , il faut avoir autour de soi des coups du destin aux bon moments . Des rencontres fortuites, une aide financière facilitent l’oisiveté.
Cela n’enlève rien à la qualité de ce premier roman ,tenu avec habileté sur plus de 500 pages par Julien Leschiera alors que le sujet du roman prédisposé à la glissade assassine.
500 pages pour transmuter un possible récit cafardeux en récit enlevé et parfois picaresque.

Des lendemains qui chantent d’Alexia Stresi. Flammarion . 💛💛💛

La quatrième de couverture m’a donné envie de me lancer dans l’histoire de Elio Leone , jeune ténor napolitain vouant une admiration sans borne à Guiseppe Verdi.
Des lendemains qui chantent d’Alexia Stresi va nous faire découvrir Elio Stresi quand il reçoit une ovation monumentale à Paris , à l’Opéra-Comique, lors de la première de Rigoletto de Verdi.
Il n’est pas le ténor vedette , mais il va lui voler la vedette.
A l’origine de cette ovation , sa voix bien évidemment , mais aussi Mademoiselle Renoult qui le couve depuis trois ans.
Rien ne prédestinait Elio Leone à cette gloire.
Elio est né avant la Première Guerre mondiale et devint orphelin dès la naissance.
L’histoire est belle : Orphelin et l’un des plus grands ténors du siècle. Cela ressemble au feel-good et à la voie royale.
Ce ne se sera pas le cas.
La vie d’Elio Leone est plus complexe que cela.
Alexia Stresi va s’employer avec une puissance romanesque à faire vivre un certain nombre de personnages au tour d’Elio. Mademoisselle Renoult ou avant elle Guiseppe Troppeano auront été des accompagnateurs. Fernande lui signifiera ce qu’est l’amour et son corollaire : la maladie d’amour. Clairvius sorcier vaudou d’Haïti énergisera sa torpeur.
Ce n’est pas toujours égal et certains moments du roman manquent de souffle et de réalisme. ( entre autre en Haiti ou lors des retrouvailles entre Elio et Fernande )
Néanmoins les scènes de jeunesse d’Elio, sa situation pendant la guerre , ou encore ses jours à la Casa Verdi sont pleine d’émotion .
Quand à Verdi et la musique classique, ils irriguent ce roman de la Force du Destin.
En synthèse , un roman qui se lit avec plaisir malgré quelques passages manquant du peps de la musique de Verdi.


Alexia Trouillard Stresi est une actricescénariste et romancière française née le 11 septembre 1971 à Nantes.

Alexia Stresi appartient à une famille d’artistes : sa mère est danseuse classique, son grand-père chanteur d’opéra et sa grand-mère pianiste1.

En 2017, elle publie son premier roman, Looping, qui est retenu dans la sélection finale du prix Goncourt du premier roman3.


Le succès n’est pas la seule des réussites, ni peut être la plus belle.

Guiseppe Verdi

On ne se baigne pas dans la Loire de Guillaume Nail. Denoël. 💛💛💛💛

Premier roman mais que de qualité, de tensions , d’originalité.
Pour écrire son roman , Guillaume Nail s’est inspiré d’un drame arrivé en juillet 1969 à Juigné sur Loire : la mort de 19 jeunes adolescents par noyade dans la Loire.
Un groupe d’adolescents de 16 à à 17 ans en termine avec une colo de six semaines. C’est le dernier jour. On m’est en place un pique nique sur les bords de la Loire.
Benoit et Pauline encadrent ses ados : Pierre, Gus, Totof, Farid , Pavel, Youssou, Jonas, Kévin, Nathan, Adone.
Soudain la phrase résonne au coeur du silence : On va se baigner ?
Ce court roman de 150 pages est fiévreux, tendu, insouciant comme cette bande d’ados.
Guillaume Nail va poser son regard et son stylo sur certains d’entre eux , auxquels il donnera à chacun des chapitres.
Des moments de vie, de difficultés, d’émois. Benoit et un fetichisme malsain ,
Pierre et un pull rose qui en font Pupulle , les émois de Pauline , le mal être parental de Gus.
Le tout écrit dans une langue étonnante faite de phrases courtes, de formules innatendues. Cela peut surprendre, mais c’est l’écriture d’une jeunesse de son temps.. Numérique, rapide, desinhibée semble-t-il.
« Faut oser un peu.. On n’à qu’une vie « 
« Ils cul-séchent leurs bières « 
« Il a couiné juste assez fort pour que Farid se retourne, qui revient, merci, sens inverse.Tout lent d’abord « 
 » Lui préfère l’instinct, hop zim boum »
 » les enfants pyjamas  »  » le grille-pain saute les tartines « 
Et puis il y a une écriture poétique pour dire La Loire. Quatre moments dans le roman pour parler du fleuve, de l’amont, de l’aval et de l’estuaire.
Des moments de calme apparent, de beauté lente et majestueuse . Mais la Loire est en réalité comme ce roman : fiévreuse et sous tension.

Un magnifique premier roman rehaussé d’une playlist qui caractérise bien les ressentis et émotions :
A nouveau sauvages – Un peu de mélancolie heureuse – Une version améliorée de la tristesse – Les Hautes Lumières – On brûlera.

Une flamme dans la main nous éclaire le passage
Redevenus païens au milieu du feuillage
Une flamme dans la main nous éclaire le visage
Sur le rivage enfin
A nouveau sauvages
[ Ramo – Thomas Emeriaux.


Guillaume Nail a de multiples talents. Il est traducteur de formation. Il est scénariste et journaliste. Il est aussi comédien.
Egalement auteur jeunesse, Qui veut la peau de Barack & Angela est son premier roman.
Guillaume partage son temps entre Paris et Barneville-Carteret, dans le Cotentin (50).

La playlist de On ne se baigne pas dans la Loire :

https://www.deezer.com/fr/playlist/11141260344

D’une Ile à l’autre de Patrick Renou. Pocket. 💛💛

L’auteur , Patrick Renou a découvert dans les archives de la Compagnie transatlantique la destinée de Milena Leneth. Cette jeune femme embarqua en 1946 sur le paquebot Ile de France depuis Cherbourg pour rejoindre New York. Milena est lettone et juive . Elle fuit le nazisme , sa famille ayant été anéanti dans les camps de la mort.
Elle est enceinte de Sarah qui naîtra sur le paquebot. L’homme qu’elle aime , Boyan l’a accompagné jusqu’à Cherbourg mais n’a pu monter sur le navire.
A partir de cette trame Patrick Renou va tisser un roman autour de cette traversée transatlantique et de l’arrivée de Milena et Sarah à New York.
Ce roman se lit sans déplaisir mais ne nous entraine pas dans son sillage pour reprendre une métaphore maritime.
Pourtant pendant ce voyage , nous apprendrons les détails et les horreurs d’une vie juive durant les années de guerre. Nous circulerons entre le différents ponts et classes du paquebot. Nous rencontrerons même Charlie Parker , Marcel Cerdan.
Nous sentirons le froid glacial et les frimas au large de Terre Neuve.
Mais cela restera terriblement documentaire.
J’ai été irrité par les énumérations successives quelques soient les sujets qui remplissent des pages. Qu’il s’agisse des mots techniques concernant un paquebot, des énumérations des voitures américaines , des acteurs , des jazzman, des lieux des Etats Unis , de New York et tant d’autres ( des lieux de Paris par exemple ) Une inflation d’énumération ne fait pas un roman.

Cinq pages néanmoins sont empreintes d’une émotion très forte. Il s’agit de l’épilogue. Dans celui ci la narratrice est la petite fille : Sarah. Cinq pages concentré dont on regrette qu’elle ne furent l’ensemble du roman.

Patrick Renou est un écrivain français né à Paris en 1954.

Abondance de Jakob Guanzon. La Croisée. 💛💛💛💛

Une couverture de roman qui dit beaucoup de ce premier roman de Jakob Guanzon .
Trois à-plats de couleurs : Rouge , Bleu comme le ciel et un quart de rond jaune pour le soleil. Des couleurs qui invitent à l’espoir , à l’ Abondance du titre du roman.
Mais il y a surtout une frise noire qui traverse ces trois couleurs. Et de cette frise noire se détachent en ombre chinoise , un pick-up et un homme de dos tenant un petit garçon par la main.
L’ombre et la lumière. Un moyen de se réapproprier son destin. Comment transformer l’ombre en lumière. Comment rendre visible l’ombre.
L’ombre c’est la vie d’Henry qui peu à peu s’est défaite jusqu’à vivre avec son fils Junior dans un pick-up. Les Etats-Unis des années 2015.
Henry a tout perdu : parents, femme, famille, boulot, reconnaissance sociale.
Il a plongé : la drogue, la violence , la prison.
L’Amérique ne l’a pas aidé. Elle abandonne facilement les laisser pour compte sur le bord de la route.
Alors défile l’Amérique périphérique avec ses mobil home, ses commerces et stations services miteux, ses motels défraichis et sa population délaissée.
Abondance est un portrait noir , éprouvant de cette nouvelle Amérique sauvage.
L’ Amérique n’est pas seule responsable de cette noirceur. Henry a sa part d’ombre et celle-ci met un sacré abat-jour sur la lumière. Mais cela mérite -il d’être traité comme un moins que rien.
Chaque chapitre de ce roman a pour titre un montant de dollars. Ces dollars dont à besoin Henry pour survivre.
Un décompte qui nous prend au tripes car il nous donne à voir la vie quotidienne de quelqu’un qui a tout perdu … sauf son fils.
La finesse du regard de Jakob Guanzon empêche que nous tombions trop bas bien que la tragédie soit présente.
C’est un roman qui frappe fort comme l’indique le New York Times sur le bandeau de couverture.
C’est un roman qui perturbe et dont on ne ressort pas indemne.
Les aléas de la vie pourraient faire de nous des Henry ou des Junior.
l’ Abondance n’est pas la chose la mieux partagée dans ce monde.

JAKOB GUANZON est diplômé de sociologie et littérature de l’université de Columbia. Il a travaillé à Madrid comme professeur, traducteur et éditeur. Abondance est son premier roman, publié dans la maison indépendante Graywolf Press (Max Porter, David Treuer…). Abondance a été acclamé par la presse et les lecteurs, et sélectionné pour le National Book Award. Il est en cours de traduction dans plusieurs pays. Jakob Guanzon vit aujourd’hui à New York.

La poésie des marchés de Anne Laure Delaye. Albin Michel . 💛💛

Que vous dire sur ce roman pour lequel je reste entre deux chaises ?En quatrième de couverture il est indiqué « A situation irrationnelle, solution irrationnelle « C’est bien le cas du roman d’Anne Laure Delaye. Il faut sûrement le prendre au quatriéme ou cinquième degré pour entrer dans cette irrationnalité.Mais à force de degré et d’irrationnalité , le propos perd de son acuité et ne défend plus la cause initiale.

Le pitch ( pour être dans le vocabulaire des personnages ) : Lucie, analyste financière chez Vega Energie maitrise les cours et la volatilité des marchés du gaz et de l’electricité.

En ce début 2022 , La Russie s’apprête à envahir l’Ukraine avec les conséquences que l’on connaît. Le monde peut-il s’effondrer ? Lucie a une prise de conscience et pour donner du sens elle souhaite développer un projet : La PPV ou Poésie Vibratoire du Vivant.

Idée audacieuse, novatrice. Pourquoi pas ?Un brun d’irrationnalité ne ferait pas de mal. Mais là , l’irrationnalité atteint des sommets entre un Sdf un peu perché , des collages et sculptures , un iguane du nom De Robert. le tout hébergé secrètement dans une pièce de l’entreprise.

Je vous fais grâce de l’écologie traité par dessus la jambe et des réunions et brainstorming sans queue ni têtes , ni des séances de saurothérapie à 150 E prodiguées par Lucie !

A force d’irrationnalité le propos dessert une réalité qui est effectivement , le coût de l’énergie , le réchauffement climatique ou encore la poésie et la pleine conscience.

Les derniers mots du roman : Ensuite on verrait bien.

En effet on verrait bien. Une fatalité qui fait qu’on est pas plus avancé.

Balle au centre.

Un passage vers le Nord d’Anuk Arudpragasam. Le Bruit du monde. 💛💛💛💛

Ce n’est pas fréquent , même voire rare , d’avoir entre les mains un roman qui nous raconte le Sri Lanka.
Anciennement Ceylan , le Sri Lanka reste lié géographiquement à l’Inde du Sud. Juste un isthme sépare l’île du sous continent indien. Cette proximité avec l’Inde fait que le Nord du Sri Lanka est peuplé de Tamouls , originaire du Tamil Nadu l’une des provinces du Sud de l’Inde. Les Tamouls vivants au Sri Lanka sont de religion hindou. Cette religion existait bien avant l’arrivée du bouddhisme dans l’île.
Depuis que le Sri Lanka a obtenu son indépendance de la grande Bretagne en 1948 les relations entre la majorité Sri Lankaise et la minorité tamoule sont difficiles. Cette tension a conduit à la formation de groupe demandant l’indépendance des Tamouls et du Nord et Nord Est de l’Ile. En 1976 fut crée le Mouvement des Tigres de libération de l’Eelam Tamoul ( LTTE ) et appelé plus succinctement les Tigres du Tamoul.
Une guerre civile féroce a ensanglanté le pays et à pris fin en 2009.
Ceci longuement posé , il est plus facile de mettre en place la trame du roman.
La guerre civile est terminée.
Krishan est un jeune étudiant qui a terminé ses études en Inde à New Delhi. Il est de retour chez sa mère à Colombo et avant d’entamer sa vie professionnelle , il souhaite aider la population du Nord de l’ile qui a été traumatisé par la guerre civile. Il se met au service d’une ONG locale.
Il revient chaque fin de semaine chez sa mère à Colombo. Celle-ci vit avec Appamma ,sa mère et grand mère de Khrishan.
Appamma est de santé déclinante et requerra à terme l’aide d’une soignante.
Lors de l’un de ses séjours dans le Nord il a rencontré Rani , femme d’un certain âge qui accepte de devenir aide soignante auprès d’Appamma.
Rani fait des retours réguliers dans son village du Nord.
Lors de l’un de ces retours , Krishnan et sa mère vont être informés que Rani a été retrouvée morte au fonds d’un puits.
Krishan souhaite assister aux funérailles de Rani et entame un long voyage en train vers le Nord du Sri Lanka.
Ce voyage sera un temps de réflexion , de calme , de retour sur lui même et de lien avec Rani.
Que penser d’un étudiant qui vit à New Delhi loin de son pays et des affres de la guerre civile.
Pourquoi être privilégié alors qu’une partie de la jeunesse est au prise avec la guerre.
Quel devoir de mémoire Krishan doit il maintenir alors que Rani a perdu son mari et des deux garçons durant cette guerre civile.
A partir d’une écriture sensible, empathique et philosophique , l’auteur , Anuk Arudpragasam nous bluffe par par le portait qu’il nous dresse du Sri Lanka , de sa jeunesse et de son avenir.
Que ce soit l’intime ou plus prosaïquement le général , son écriture détaillée , très précise nous entraine au cœur des sentiments ou au cœur des rites des funérailles hindous avec une grande sensibilité.
Pour avoir découvert il y a une dizaine d’années le Sud de l’Inde et le Sri Lanka , j’ai retrouvé dans ce roman  » Un passage vers le Nord  » des émotions qui m’avaient traversé.
Une très belle découverte.

Docteur en philosophie diplômé à l’université Columbia, il a publié deux romans. Le premier, Un bref mariage, a été nominé au prix Dylan-Thomas. Le deuxième, Un passage vers le Nord, lui a valu d’être l’un des finalistes du Prix Booker en 2021.

Arudpragasam est né en 1988 à Colombo, Sri Lanka, de parents tamouls1. Il a grandi dans une famille aisée de Colombo. Sa famille est originaire du nord-est du pays. Cependant, lui-même n’a jamais été en contact direct avec la guerre civile qui a fait rage dans le nord et l’est de Sri Lanka de 1983 à 2009. Bien qu’il ne soit pas issu d’une famille littéraire, ses parents l’ont encouragé à lire des livres dès son plus jeune âge. Arudpragasam n’a suivi leurs conseils qu’à l’adolescence, lorsqu’il a trouvé un gout pour la littérature philosophique dans une librairie de Colombo2. Il a déménagé aux États-Unis à l’âge de 18 ans pour poursuivre des études à l’université Stanford, où il a obtenu un Bachelor of Arts (BA) en 20103. Après l’obtention de ce diplôme, il a vécu pendant un an dans l’État indien du Tamil Nadu. Il a ensuite entamé un doctorat en philosophie à l’université Columbia, qu’il a achevé en 2019. ( Biographie Wikipédia )

A retrouver sur Le Monde :

https://www.lemonde.fr/livres/article/2023/01/29/un-passage-vers-le-nord-d-anuk-arudpragasam-cendres-du-deuil-au-sri-lanka_6159757_3260.html

Le cartographe des absences de Mia Couto. Metailié. 💛💛💛💛

 » Les lieux sont comme les livres. Ils n’existent que lorsqu’on les lit pour la deuxième fois ».
Comment mieux définir le cartographe des absences de Mia Couto.
Histoire personnelle que raconte l’auteur.
En 2019 l’université de Beria au Mozambique invite le poète Diogo Santiago. Celui-ci va retourner au Mozambique sur les traces de son enfance et de celle de son père entre autre.
Son père Adriano Santiago , poète lui aussi, engagé contre le colonialisme portugais.
Ce retour au pays va redessiner la cartographie des absences et lui permettre de trouver les traces de son passé et de celui des hommes et des femmes qui ont vécu ce colonialisme portugais.
Le roman sera un incessant ballet entre ces années 1970 et l’année 2019.
Pour faire le lin entre ces deux périodes Diogo rencontrera Liana Campos. Liana est une orpheline. C’est parents se sont suicidés car ils ne pouvaient vivre leur amour étant de race différente.
Liana avait comme grand père Oscar Campos , inspecteur de la police du colonisateur , la sinistre PIDE.
Liana a récupéré chez ce grand père un certains nombre de documents concernant l’époque de la colonisation. Il s’agit surtout de courriers et du cahier intime du père de Diogo.
La cartographie des absences va pouvoir se dessiner.
En retour , Diogo aidera Liana à découvrir elle aussi sa cartographie des absences.
Liana et Diogo découvriront le niveau de violence et de racisme de ces années de colonisation ainsi que les choix qu’ont du faire leur père ou grand père.
Ce roman est porté par l’écriture et la poèsie de Mia Couto.
L’indicible est dit de façon claire, brutale, mais souvent avec les mots poétiques attribués à Adriano ou Diego Santiago.
Des portes ouvertes sur un avenir ou l’espoir est présent.
 » le souvenir est le meilleur moyen d’échapper au passé « 
« Je n’ai pas assez de ma peau, j’ai besoin de la tienne pour ne pas saigner « 
« La maison est une attente, seul revient celui qui n’en est jamais sorti »
« Tu apprendras mille langues, et tu mourras toujours dans une langue inconnue « 
« Le poète, ce gardien des histoires qui charrie des absences et des silences comme s’ils étaient des graines « 
Le cartographe a fait que des absences sont devenues des présences.
Des présences qui mettent un nom sur des hommes et des femmes et sur un pays qui ont survécu au colonialisme et à une guerre civile.

Mia Couto est né au Mozambique en 1955. Après avoir étudié la médecine et la biologie, il s’engage aux côtés du frelimo en faveur de l’indépendance du pays, devient journaliste puis écrivain. Il travaille actuellement comme biologiste, spécialiste des zones côtières, et enseigne l’écologie à l’université de Maputo. Pour Henning Mankell, « il est aujourd’hui l’un des auteurs les plus intéressants et les plus importants d’Afrique ». Ses romans sont traduits dans plus de 30 pays.

Il a reçu de nombreux prix pour son œuvre, dont le Prix de la francophonie en 2012, le prix Camões en 2013, le prix Neustadt 2014 (Allemagne), il a également été finaliste de l’Impac Dublin Literary Award et du Man Booker Prize en 2015.

Qui se souviendra de Phily-Jo de Marcus Malte. Zulma. 💛💛💛💛💛

Qui se souviendra de Phily Jo ?
Oui qui s’en souviendra ? Sûrement les lecteurs du roman de Marcus Malte.
C’est un roman jubilatiore où l’ on se laisse manipuler sachant qu’il est bien difficile de faire la part des choses.
Tout commence avant la lecture du roman quand on s’aperçoit que le roman a été traduit de l’américain par Édouard Dayms .
Comment se peut il qu’un personnage d’un précédent roman de Marcus Malte soit le traducteur d’un écrivain bien français.
La manipulation est en marche.
Visualisez des poupées gigognes. Des belles babouchkas colorées. Vous ouvrez la première et vous trouvez une autre babouchka un peu réduite et toujours autant colorée. Et ainsi de suite. Tout s’emboîte bien et ses couleurs vives !
Avec le livre de Marcus Malte vous avez la même impression. 5 chapitres comme autant de babouchkas, 5 chapitres haut en couleurs qui emboîtés les uns dans les autres sont un grand moment de lecture et de manipulation.
La première poupée gigogne est d’importance. C’est celle que l’on voit, qui fait miroiter ses couleurs.
Cette poupée nous raconte l’histoire mais surtout la mort d’un Geo Trouve-t-on : Phily Jo Deloncle.
Phily Jo est tombé d’un hôtel à Dallas . Il avait 34 ans. Suicide ou meurtre ?
Le questionnement est mené par le narrateur, son beau frère, qui est enclin à croire au meurtre.Phily Jo avait réussi à transformer l’énergie en FreePow, l’électricité libre et gratuite.
S’il y avait eu meurtre c’est parce qu’une organisation, la Pieuvre Noire , à la solde des producteurs d’énergie fossiles, veillait au bon fonctionnement du capitalisme et des intérêts bien sentis des dirigeants américains.
Je ne vous ai pas encore dit que nous sommes aux États Unis et au Texas plus particulièrement. La Mecque du pétrole, du Stetson du rock et de la country.
Le narrateur nous dit ses doutes et les mystères qui entourent la vie de Phily Jo.
Qui se souviendra de Phily Jo ?
La première poupée gigogne est en place.
Le récit doit se suffire à lui même.
Alors on change de narrateur pour chaque nouvelle poupée gigogne et chaque narrateur nous raconte la même (?) histoire avec un éclairage différent. Quelle vérité, quelle réalité. Les poupées gigogne ont la même forme, les mêmes couleurs, et pourtant leurs réalité sont différentes.
Marcus Malte nous entraîne loin dans la manipulation mais c’est un plaisir de le suivre et de se perdre dans ses emboîtement maléfiques ou pas.
Touts ces emboitements et manipulations seraient vains si le roman n’était inscrit dans la réalité de la première démocratie au monde: les États Unis. Une démocratie bien mal en point dans laquelle des condamnés vivent vingt ans et plus dans les couloirs de la mort, dans laquelle la famille Bush fut  » le roi du pétrole  » , dans laquelle un président permit l’assaut du Capitole.
Roman diabolique à l’ironie mordante, n’oubliant pas les références musicales et littéraires
Et puisque que l’on parle littérature, peut on envisager que l’écrivain est un grand manipulateur ? On croit à sa fiction à ses personnages. On accepte de ne pas croire au réel.
Comme quand on annonce que ce roman est traduit de l’américain. A chacun de se faire son avis. Pour qu’elle raison Marcus Malte n’aurait pu écrire un roman en langue
anglaise ?
Vous avez 5 poupées gigognes pour répondre.

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Marcus Malte, pseudonyme de Marc Martiniani, né le 30 décembre 1967 à La Seyne-sur-Mer1, est un romancier et nouvelliste français, auteur de plusieurs romans policiers et ouvrages de littérature d’enfance et de jeunesse.

L’odyssée de Sven de Nathaniel Ian Miller. Buchet – Chastel . 💛💛💛💛

L’odyssée de Sven est un premier roman qui tient toutes ses promesses. Il ne faut pas s’arrêter au titre et à la couverture du livre. Il ne s’agit pas seulement d’un roman d’aventure se déroulant dans le Grand Nord au Spitzberg.
Nathaniel Ian Miller s’est inspiré d’un véritable chasseur – trappeur dont on ne sait pas grand chose pour son histoire.
Sven est un jeune suédois vivant à Stockholm au début du 20éme siècle. Ce nouveau siècle synonyme de travail , de lutte des classes ne lui convient guère. Ses lectures lui ont fait découvrir Nansen, Amundsen, les explorateurs polaires.
Quittant Stockholm il décide d’assouvir cette passion en rejoignant le Spitzberg et en devenant mineur .
L’aventure géographique, exploratrice va devenir humaine.
A travers ces expériences Sven va découvrir en lui un besoin de solitude, de retrait de la famille, du monde mais aussi un besoin de retour à l’animal, à la nature.
Plus prenant encore un retour à la pierre, à la géologie. Dans ces contrées sauvages, dures et froides le minéral prend toute sa place.
Pour vivre ce chamboulement Sven va être accompagné de personnages profondément humains comme Tapio le trappeur, Charles McIntyre ou encore Eberhard le chien.
C’est avec cette palette de personnages que le roman est plus qu’un roman d’aventures.
Nathaniel Ian Miller nous met en présence de personnages atypiques, improbables. Dans une société dite civilisée, ces personnages n’auraient pas pignon sur rue. Ils feraient partie des déclassés, des laisser pour compte.
Ici, il porte l’histoire. Derrière les affres de la vie il n’y a qu’empathie, solidarité.
On se trouve bien dans ce Grand Nord ! Ce Grand Nord dans lequel Sven et Charles McIntyre n’oublient pas les bienfaits des livres et de l’amitié.
C’est aussi un roman de l intériorité, de la découverte de soi et de la redéfinition de la famille.
Sven était parti pour connaître la solitude. Il en reviendra plus social et ayant fait des émules.
L’odyssée porte bien son nom : un voyage rempli d’aventures singulières auquel Nathaniel Ian Miller donne un éclat particulier par son empathie et son humanité.
Les cabanes du Spitzberg doivent encore être empreintes de l’âme de Sven, Tapio, Helga, Charles ou Eberhard.


Nathaniel Ian Miller est éleveur de bétail dans le Vermont. En 2012, il a participé à la résidence Arctic Circle dans le Svalbard et a découvert la cabane de Sven. L’Odyssée de Sven est son premier roman.

Nathaniel IanMiller a écrit pour le Santa Fe Reporter , Durango Herald , Milwaukee Journal-Sentinel , Missoula Independent et Virginia Quarterly Review . Il est titulaire d’un BA de l’Amherst College et d’une maîtrise en écriture créative et d’une maîtrise en études environnementales de l’Université du Montana.
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