Sur la desserte il y une bonne dizaine de livres, lus où à lire. Dans ces livres depuis quelques mois, la couverture du roman Né d’aucune femme de Franck Bouysse m’appelait régulièrement. Mais je remettais la lecture préférant tel autre roman.
Et puis en ce début de 2020 l’appel du livre à été le bon.
Mais quel appel. Commencer 2020 sous les auspices de Franck Bouysse met le curseur très haut dans la qualité d’écriture, l’émotion, l’empathie, la noirceur, la lumière et les très-fond de l’âme humaine.
Comment ne pas être bouleversé par ce roman d’une rare sensibilité, vibrant, poignant, vous prenant dans ses filets et ne vous lâchant plus.
Nous sommes quelque part entre Limousin et Perigord dans la deuxième moitié du 19ème siècle. Gabriel est prêtre et il a charge d’âmes. Et l’une de ces âmes, en confession, lui demande alors qu’il va bénir le corps d’une femme à l’asile de récupérer des cahiers cachés sous sa robe.
Ce sont les cahiers de Rose. Cahiers dans lesquels Rose raconte son histoire afin que celle ci ne soit pas oubliée.
Rose est une jeune fille de 14 ans qui a été vendu par son père paysan à un maître châtelain.
Elle a été vendu car son père, sa mère, ses trois soeurs n’arrivent pas à vivre du fruit du travail de la terre et de l’élevage.
A partir de là vont s’enchaîner de façon logique et dramatique une série d’événements qui marqueront la vie de Rose.
C’est tragique, c’est romanesque. Par son écriture magistrale Franck Bouysse nous emmène au fond de l’âme humaine mais aussi au fond des bois et des demeures. On entend les planchers craquer ainsi que les branches dans les bois . On distingue l’ombre de la bougie sur le mur de la chaumière. On ressent physiquement les cris, la violence ou encore la chaleur de la forge.
Et quelle écriture remarquable pour nous traduire les sentiments, les peurs, les émotions de Rose.
L’histoire que nous raconte Franck Bouysse dans Né d’aucune femme est une histoire somme toute assez » classique » dans cette deuxième partie du 19eme siècle. Qui n’a pas rencontré en faisant des recherches dans sa généalogie des ascendants qui sont des enfants abandonnés, des bâtards ou encore des enfants cachés. Qui n’a pas dans ses ancêtres une bonne qui a fauté avec un bourgeois ou un châtelain.
Cette réalité, Franck Bouysse l’a sacralisée au travers de Rose et des personnages de son roman. Nous sommes partie prenante des personnages et comment ne pas être ému par cette page où il nous décrit le petit déjeuner des trois soeurs de Rose. Comment ne pas être ému devant la mère de Rose , devant Onésime ou encore devant Edmond.
De la même façon comment ne pas crier notre colère au maître, à la vieille ou encore au docteur.
Et puis nous partirions bien chevaucher à travers bois sur la jument.
Le roman de Franck Bouysse est magistral car son récit est complet. Tout est compris dans le roman, de l’indicible à l’espoir, du mal à l’amour, de la violence à la bienveillance.
D’une histoire commune à beaucoup de personnes au 19eme siècle il en fait Une vie qui touche à l’universel.
Rose restera encore longtemps mes côtés.
» ma manière de le remercier pour tout ce que j’ai cru pas être la réalité, jusqu’à ce que je me retrouve dans le tourbillon, la seule réalité, celle d’hier, celle d’aujourd’hui, celle de demain, celle de toujours, celle de cette vie et celle d’après cette vie » ( p.284 ).
Immense grandeur de l’âme humaine.
Archives mensuelles : janvier 2020
Journal d’un amour perdu d’Eric Emmanuel Schmitt. Albin Michel. 💛💛💛
Comme à l’habitude Éric Emmanuel Schmitt écrit bien. L’écriture est fluide, la langue française est à son meilleur. L’humanisme, l’empathie, l’émotion habite le livre. Et pourtant il y a un je ne sais quoi qui dérange.
Pourtant le sujet du roman Journal d’un amour perdu est on ne peut plus universel : la perte de sa Maman.
Peut être que ce qui me dérange est cet amour quasi incestuel entre Éric Emmanuel Schmitt et sa mère.
Tout cela est remarquablement écrit, ressenti. Les moments de détresse, tout comme les moments de l’enfance. Et pourtant il y a quelque chose qui dérange.
Serais ce le besoin de nier le père ( secret de la naissance ) afin que seule existe la relation avec Maman.
Et que penser du secret détenu par les Riklin sinon qu’il s’agit d’une facilité romanesque pour faire exister un moment le père.
Vous aurez compris que je reste mitigé, partagé devant ce Journal d’un amour perdu.
Contrairement à ce qui est indiqué en quatrième de couverture, je ne pense pas que nous touchions à l’universel à force de vérité personnelle et intime.
La vérité intime n’est que partielle et partiale. L’universel ne se suffit pas de partialité et de vérité partielle.
Black Messie de Simonetta Greggio .Stock. 💛
Il m’a fallu du courage pour aller au bout du roman de Simonetta Greggio Black Messie. J’avais lu d’elle Les Nouveaux monstres et cela avait été une lecture agréable autour de ces hommes politiques et de pouvoir d’Italie.
Black Messie est un livre monstrueux dans l’acceptation littérale du mot.
Simonetta Greggio prend comme décor de son roman Florence, dans laquelle un serial killer tue ( le mot est gentil ) filles et garçons. Ces meurtres ressemblent étrangement aux meurtres de 7 jeunes couples dans les collines de Toscane entre 1968 et 1985.
Le meurtrier appelé le monstre de Florence n’a jamais été arrêté. Serait il lui qui serait de retour 30 ans après .
Pour son enquête, Simonetta Greggio s’appuie sur le caporal Jacopo d’Orto, sur Miles professeur de littérature américaine, sur Indiana la fille de Miles, sur Nonnie, Nino, Légion ou encore HS. L’enquête et la poursuite du meurtrier est vu au travers de ces personnages avec leur point de vue.
Cela devient vite confus car à ces personnages s’ajoute la CIA, les sociétés secrètes comme les Croix Rouges, un peu de Renaissance , l’album blanc des Beatles ou encore l’assassinat de Sharon Stone par Charles Manson.
Bien évidemment les meurtres peuvent être qualifiés de gore, sexuel, satanique etc….
Voilà un roman d’une grande confusion sans colonne vertébrale et pataugeant dans une violence effrénée.
Cela flatte-t-il le morbide , le voyeurisme, notre côté obscur.
Je fuis.