Un simple dîner de Cécile Tlili. Calmann-Lévy. 💛💛💛💛

Un simple dîner est le premier roman de Cécile Tlili. Un roman court ( 179 pages ), concis et respectant une unité de lieu et une unité de temps.
Unité de lieu : un appartement boulevard Raspail à Paris
Unité de temps : le temps d’un dîner.
Il y a quatre protagonistes. D’abord le couplé qui reçoit. Il s’agit de Claudia et Étienne. Claudia., kinésithérapeute est une femme maladivement timide et inhibée . Sa cuisine reste un refuge majeure. Étienne fait partie d’un cabinet d’avocat, il est beau gosse et maintient sa femme Claudia dans sa timidité maladive.
Les invités sont Rémi et Johar. Rémi est professeur quand sa femme Johar est une carriériste et business woman.
Rémi et Étienne se connaissent depuis les bancs de la Fac de droit.
Le huis clos entre ces quatre personnages va s’installer autour de deux nouvelles :
Johar doit donner son accord à son supérieur Karl pour un poste de directrice générale.
Étienne souhaite obtenir de Johar un nouveau mandat pour son cabinet d’avocat.
A partir de ces deux nouvelles, cela va être un grand chamboule tout que maîtrise parfaitement Cécile Tlili.
Les ressentis de chacun sont explorés avec une mise en avant de Claudia et Johar. Les réactions sont justes, pertinentes.
La tension monte peu à peu, chacun dévoilant des fissures , des non-dits.
De ce huis clos certains ou certaines vont tenter de s’affranchir des règles de vie de la société.
Et la perte est peut être facilitation pour s’affranchir.
Un seul bémol à la qualité de ce premier roman : le milieu social des personnages.
Je ne suis pas certain que dans un autre milieu social, l’affranchissement de certaines règles de vie soit aussi simple.

Cofondatrice en 2020, aux côtés de Constance Baudeau et Mélody Mitterrand, de l’école Walt pour les enfants diagnostiqués neuro-atypiques, Cécile Tlili prend la plume pour la première fois avec « Un simple dîner » pour leqyel elle est lauréate du prix Gisèle Halimi 2023.

Et vous passerez comme des vents fous de Clara Arnaud. Acte Sud . 💛💛💛💛💛

Trois personnages inoubliables. le décor pyrénéen, l’estive, la montagne, les villages…. Et puis l’Ours.
Le roman commence en 1902 avec Jules, jeune garçon des Pyrénées ariègeoises. Celui-ci part dans la montagne prélever un jeune ourson dans la tanière familiale. La description est grandiose. Revenu au village d’Arpiet, il pense pouvoir réaliser son rêve, quitter les Pyrénées et parcourir le monde avec son ours, tantôt guérisseur tantôt bête de foire.
Au fil du roman, Jules reviendra nous donner des nouvelles de son parcours autour du monde avec son ourse.
Le narratif principal se situera de nos jours autour de deux autres personnages : Gaspard et Alma.
Gaspard est revenu en Ariège avec sa femme et des deux filles. le retour à la terre. de nouveau il passera l’été là-haut dans la montagne avec ses bêtes, ses chiens et sa jument.
Alma est éthologue. Pour son métier elle a vécu auprès des ours en Alaska et en Asturies. Sa nouvelle mission est d’étudier l’adaptation des ours dans la montagne ariègeoise.
L’écriture de Clara Arnaud est à la hauteur de la beauté de la montagne et de la nature. On est au plus près de l’estive, de la transhumance, de la vie des brebis. La rosée nous enveloppe tout comme le brouillard sur le Mont Calme. Les bruissements nous surprennent au détour d’une page. On est heureux d’être encabané quand l’orage se déchaine. On est dans les pas d’Alma au plus près de la vie des plantigrades. La vie, les saisons, les dangers, la mort animale ou humaine.
Tout pourrait être pour le mieux dans cette nature mais les peurs ancestrales et actuelles des humains prennent parfois le dessus. L’ours reste un fauteur de trouble, un mangeur de brebis. Il est pourtant dans son milieu, dans sa tanière. Est-il possible d’envisager une cohabitation entre l’homme et l’animal ?
L’auteur ne prend pas partie mais explore toutes les pistes. Les regards différents de Gaspard et d’Alma se répondent et proposent une réflexion profonde sur le rapport au sauvage.
On ressort de ce livre avec un surplus de vie, d’émotion, un besoin d’arpenter la montagne, de respecter les bergers, l’estive et les ours.
La montagne, les brebis, l’ours, les hommes est un fil d’ariane que nous rappelle Clara Arnaud. Gaspard vit dans l’ancienne maison de Jules, le montreur d’Ours.
Clara Arnaud termine son roman pars les vers d’Hovhannés Chiraz :
Nous étions en paix comme une montagne
Vous êtes venus comme des vents fous
Nous avons fait front comme nos montagnes
Vous avez hurlé comme les vents fous
Eternels nous sommes comme nos montagnes
Et vous passerez comme des vents fous.
Belle réflexion qui referme ce magnifique roman.

Clara Arnaud est écrivain voyageur et romancière.

La lecture de récits d’aventure exacerbe ses rêves de voyage et, à 15 ans, elle découvre la langue chinoise. Mais son premier voyage en Chine n’est pas pour tout de suite : à 16 ans, elle traverse l’Europe en train, du sud au nord ; à 17 ans, elle pédale seule au Québec et réitère l’expérience cycliste dans l’Ouest irlandais un an plus tard. Puis, c’est au Kirghizistan que la porte sa farouche passion pour les montagnes et les chevaux.

En 2008, après une année de préparation et âgée d’à peine 21 ans, Clara Arnaud débarque en Chine. Durant cinq mois, ce pays lui offre une expérience bouleversante qui culmine au Tibet et dont elle tire un récit aux éditions Gaïa intitulé « Sur les chemins de Chine » pour lequel elle reçoit de nombreux prix dont le Grand prix de la fondation Zellidja en 2009.

Entre ses voyages, Clara se consacre à ses études de géographie, de chinois et d’économie à Sciences-Po, ainsi qu’à sa passion pour la course à pied et l’équitation. Elle est titulaire d’un master à Sciences-Po (2009-2011) et à l’Université Tsinghua (2011).

Clara Arnaud travaille depuis plus de dix ans sur des projets de développement international, et ses premières missions l’amènent au Sénégal, au Bénin et au Ghana, avant la République Démocratique du Congo et le Honduras.

Elle consacre son premier roman, « L’orage » (2015), à Kinshasa, la capitale congolaise où elle restera deux ans. En 2021, elle publie son roman, « La verticale du fleuve ».

Dans ces remerciements Clara Arnaud pensent surtout à Francis Chevillon et Gilda Chevillon sans qui le texte du roman serait tout autre chose.

Voici un texte de Francis Chevillon sur l’apprivoisement du berger.

Comment apprivoiser un berger

Francis Chevillon, bergerIl y a beaucoup d’espèces plus ou moins en voie de disparition dans les montagnes. Aujourd’hui, je voudrais parler de celle que l’on appelle communément « pâtre » ou « berger. »

C’est une espèce étrange, généralement armée d’un bâton, d’un couvre-chef de formes plus ou moins diverses et d’un parapluie en bandoulière (quel que soit le temps d’ailleurs). Pratiquement, il est toujours accompagné d’un ou plusieurs chiens, souvent bruyants, mais pas toujours agressifs.

Ses moeurs sont quelquefois surprenantes: affable, ou bourru, sans qu’on ne comprenne toujours la cause. Nous avons à ce propos relevé quelques constantes intéressantes:

Plus le groupe de visiteurs sera important et voyant, plus il aura tendance à se cacher.

D’autre part, on peut noter qu’il est assez facile à apprivoiser avec du vin, du Ricard ou de la viande rouge (la verroterie est à déconseiller), par contre, nous en avons rencontré un qui préférait le jus de fruit au vin, le riz complet et la salade au steack braisé (ces goûts bizarres correspondent, nous semble-t-il, à la longueur des cheveux du-dit berger, mais cela reste à vérifier!)

2 bergersAprès une étude psycho-sociologique poussée et de nombreuses expériences, nous avons déterminé un point qui semble fondamental et doit conditionner toutes nos attitudes. Il est persuadé, dans tous les cas–même si c’est à des degrés divers–que la montagne lui appartient. Il s’agit donc, pour nous, d’en tenir compte. Par exemple, il appréciera toujours qu’on lui demande la permission d’établir un campement, ou de capter une source. Il s’avérera même dans certains cas de « bons conseils », notamment pour prévoir le temps (il semble jouir à ce propos d’un sens supplémentaire), ou pour nous aider dans un travail de prospection car, en général, il connait assez bien son secteur, quoiqu’il marque un dégout souvent prononcé pour tout ce qui peut ressembler à un trou ou à une grotte. A ce propos, il est toujours judicieux de lui faire remarquer qu’après nos explorations, nous reboucherons ou nous protégerons les trous que nous avons désobés. De même qu’il aime à ce que la place du campement soit nettoyée au moment du départ (plastiques, boîtes de conserves, etc…)

Une autre constante d’ordre psychologique que nous avons pu observer est le fait que « la modestie ne l’étouffe pas ». Il aura même tendance, dans certains cas, à pratiquer une attitude condescendante en ce qui nous concerne. Nous en avons même rencontré un qui se comparait à l’Aigle ou à l’Isard. Cela semble dû au fait qu’il se tient plus particulièrement sur les crêtes ou aux endroits escarpés pour surveiller son bétail.

Une méthode simple pour l’apprivoiser consiste à lui signaler les bêtes isolées que l’ont peut apercevoir, en prenant bien soin de lui signifier la marque ou « pégé » qu’elles ont sur le dos, ainsi que sa couleur ou sa localisation. (Le pégé est une marque à la peinture que les brebis ont, soit sur les épaules, le dos ou l’arrière-train; il est différent selon les propriétaires. Les vaches quant à elles n’ont qu’une étiquette (appelée « boucle ») à l’oreille, avec un numéro). Il convient de le renseigner de façon assez souple afin de lui laisser la possibilité de dire « qu’il le savait déjà ». Idem pour les bêtes mortes que l’on peut rencontrer.

A ce propos, il semble évident qu’il nous faut éviter à tout prix de laisser rôder nos chiens (il est même grandement préférable de ne pas en avoir) car il marque un obession notoire à ce sujet.

Pour que le contact soit facilité, il est nécessaire de connaître quelques termes dont il se sert le plus couramment, afin d’éviter d’être traité de « touriste »–ce qui sonne souvent comme une insulte dans sa bouche.

Les BREBIS ou femelles adultes. Elles sont la grosse majorité du troupeau et c’est le terme général qu’il emploie lorsqu’il veut parler d’un groupe, et non pas le vocable MOUTON réservé aux mâles chatrés de plus d’un an. Les mâles entiers pour la reproduction étant les BELIERS, souvent avec des cornes, encore que cela dépende des régions, de même que les brebis.

Un berger sur les estivesIl emploie le terme « mousquer » ou « coumer » pour parler de l’habitude qu’on les bêtes de se protéger du soleil pendant les heures chaudes du midi. C’est d’ailleurs une attiutde qu’il partage aussi volontiers. Il parle de « faire la sieste » et il n’est jamais judicieux de venir le voir à ces heures là, même pour lui demander une boîte d’allumettes ou un ouvre-boîtes.

Une autre tactique d’apprivoisement que nous avons employée avec succès–surtout dans le cas de cabane isolée ou éloignée de la limite des bois–consiste à lui rendre visite avec un fagot de bois que l’on décharge ostensiblement devant la porte de son abri. Sa reconnaissance, même si elle n’est pas marquée, sera bien évidemment proportionnelle à la dimension du-dit fagot. Cette méthode est donc à déconseiller aux personnes déjà lourdement chargées ou fatiguées de naissance, mais peut provoquer une invitation à la veillée dans la mesure où l’on aime à entendre des histoires animalières ou de l’ancien temps. (Il convient d’éviter dans ce cas d’arriver trop nombreux, surtout si l’on ne fournit pas la boisson.)

Soulignons à ce propos qu’il est fermement déconseillé de pénétrer dans « sa » cabane en son absence, même si celle-ci (errare humanum est) est portée « refuge » sur notre carte.

Un autre sens (en plus de la prédiction du temps dont nous avons parlé plus haut) semble être plus développé que d’ordinaire, c’est la vue, qui’il complète d’ailleurs trés souvent par une paire de jumelles plus ou moins sophistiquées. A ce propos, il nous faudra admettre qu’il sera presque toujours au courant de tout ce qui touche nos allées et venues ou nos activités matinales. Il faut savoir en tenir compte.

Es espérant que ces quelques remarques sans prétention puissent aplanir le fossé qui sépare presque deux civilisations, et qu’ensemble nous puission jouir des montagnes qui nous entourent.

–Francis Chevillon

Okavango de Caryl Férey. Gallimard série Noire. 💛💛💛💛

Depuis longtemps j’ai entendu parler des polars de Caryl Férey. Des polars du bout du monde : Zulu, Mapuche Haka.  Jusqu’alors je n’avais pas succombé. Les ambiances violentes, ultra-noires et glauques me laisser à l’écart.

Et puis il y eut Okavango.

Rien que le nom est un appel au voyage et au mystère. Okavango, le fleuve dont le delta se perd au milieu des terres d’Afrique australe. Okavango, le paradis du Big Five. Okavango, la nature sauvage.

Qu’allait en faire Caryl Férey ?

Okavango est bien plus qu’un polar ou un thriller noir et violent. Caryl Férey a réussi à mettre dans le même creuset le monde politico-historique, les guerres civiles, l’héritage de la colonisation, les ethnies des différents pays, le braconnage international, des histoires d’amours et des animaux partout !

Tout est juste tout au long de ce roman engagé d’une violence très réaliste.

Tout commence par le meurtre d’un jeune Khoi ou San au sein d’une réserve ultra sécurisée. La réserve, Wild Bunch appartient à John Latham, Sud-Africain blanc pour lequel on ne donnerait pas le Bon Dieu sans confession. Afin de retrouver l’assassin une ranger est envoyée. Elle s’appelle Solanah Betwase. Elle est Botswanaise. Elle représente la KaZa, grande réserve animalière comprenant 36 réserves dispersées sur 5 Pays : Namibie, Botswana, Angola, Zambie et Zimbabwe.

La mort de ce jeune Khoi ou San n’est que la partie émergée de l’iceberg. D’autres meurtres d’humains, d’animaux voir des empoisonnements rituels mettent Solanah Betwase sur la piste d’un vaste traffic de braconnage entre l’Afrique et l’Asie. Les lions, les éléphants, les rhinocéros sont violemment tués afin de récupérer cornes, défenses et ongles.

Au-delà de la qualité du roman, ce qui émeut c’est la place donnée au monde animal. Qu’il s’agisse de lions, de gazelles, d’hippo, de rhino, d’éléphants, de guépard, de hyènes, d’oiseaux, ils sont les personnages centraux du livre et participent activement à ce thriller. Et l’on n’est pas surpris de lire qu’un lion a été assassiné et que l’homme devient une proie !

Les animaux ne sont plus des victimes expiatoires.

La liberté et la préservation des animaux et de la nature concourt à notre propre liberté. Dans son roman, Caryl Férey écrit un vibrant plaidoyer pour la défense des animaux. En note d’auteur Caryl Ferey nous rappelle qu’il voulait être tueur de braconnier quand il était petit. Okavango est une belle arme, violemment pacifique.

Il nous dit aussi que voir les animaux dans leur maison est bouleversant, ou alors on est un caillou.

Il y a encore des cailloux sur le chemin, mais il me semble que nous sommes tous les jours un peu plus nombreux à la faire valser loin du chemin.

 Seth, Priti et Solanah nous précèdent.


Né à Caen1, Caryl Férey grandit en Bretagne après l’installation de sa famille à Montfort-sur-Meu, près de Rennes, en 1974. Sa mère tenait une petite parfumerie, son père était VRP pour une multinationale fabriquant des emballages. Sa grand-mère institutrice lui a transmis le goût de la lecture1. Son prénom lui a été donné en référence au condamné à mort américain Caryl Chessman, exécuté en 19602.

Après avoir été expulsé d’établissements scolaires, il achève sa scolarité par correspondance et obtient son baccalauréat1,3.

À la fin des années 1980, il est admiratif du style de Philippe Djian, dont il a lu le roman Bleu comme l’enfer. Exempté du service militaire à Rennes, il part avec un ami en Nouvelle-Zélande4.

Grand voyageur, il parcourt l’Europe à moto, et fait un tour du monde à vingt ans5.

Les principaux romans de Caryl Férey se situent dans des pays marqués par un passé récent douloureux – colonisation, apartheid, dictature – qui sert de toile de fond à ses histoires : la Nouvelle-Zélande pour Haka et Utu, l’Afrique du Sud pour Zulu, l’Argentine pour Mapuche, le Chili pour Condor et la Colombie pour Paz.

Ses livres sont des romans noirs où la critique sociale et le chaos sont omniprésents. « Je me sens toujours du côté des opprimés », déclare-t-il en 20173.

Caryl Férey travaille près de quatre ans sur chaque roman1. Il procède par étapes : un premier voyage pour découvrir le pays, prendre des repères ; ensuite commence un long travail de documentation, d’études, avant de passer à l’écriture de l’histoire ; un nouveau voyage sur place privilégiera les rencontres et permettra d’affiner, d’ancrer dans le réel ; et au retour c’est l’écriture elle-même qui est travaillée encore un an5. Lorsqu’il écrit, c’est environ 7 ou 8 heures par jour4.

Stupeur de Zeruya Shalev. Gallimard. 💛💛

Stupeur est un roman dans lequel se superpose deux époques de l’Etat d’Israël. Ces époques sont servies par deux personnages féminins, Rachel et Atara qui se répondent tout au long du livre.

Première période vers 1948. La Palestine Mandataire, occupée par les Anglais, devient Israël. Cette période est racontée par Rachel. Elle faisait partie d’une organisation clandestine, sioniste, qui fomentait des attentats contre l’occupant anglais.  Dans cette clandestinité elle a rencontré Menahem Rubin dit Mano. Ce fut son premier amour. Un amour solaire. Ils se marièrent et un an plus tard Mano interrompra cette relation et disparaitra.

Deuxième période, de nos jours. Mano, chercheur reconnu, se meurt à l’aube de ses quatre vingt douze ans. Lors d’une visite à son père, Atara découvre que celui-ci l’appelle Rachel et lui dit :

« Que tu es belle, ma compagne, que tu es belle ! tes yeux sont ceux d’une colombe derrière ton voile, la chevelure est comme un troupeau de chèvres dévalant du Mont Galaad. (Cantique des Cantiques) Je ne t’ai pas trahie, Rachel, je n’ai pas eu d’autres femmes, j’ai tenu ma promesse « 

Atara va vouloir à tout prix rencontrer Rachel pour connaitre le passé et comprendre la difficile relation avec son père.

Cette recherche va nous permettre de découvrir, par bribes, la vie de Rachel et Mano et nous faire entrer plus intimement dans la vie actuelle d’Atara.

Je n’ai pas réussi a adhérer à cette recherche. Le roman m’est apparu lent, fastidieux dans la lecture, voire confus parfois. La psychologie des personnages est approfondie à l’extrême, revenant plusieurs fois sur le même sujet par des facettes différentes.

Contrairement à ce que laisse penser la quatrième de couverture, l’histoire d’Israël est survolée. Reste donc une déception.


Zeruya Shalev est née au kibboutz Kinneret où est également née la poétesse Rahel. Elle grandit à Bet Berl, près de Kfar Saba, avant de venir étudier la Bible à l’université hébraïque de Jérusalem. Sa famille compte plusieurs écrivains[Lesquels ?], et elle a baigné dans une atmosphère où l’écrit et la littérature étaient valorisés au plus haut point[réf. souhaitée]. Son père, Mordehai Shalev, est un critique littéraire renommé. Son oncle est le poète Itshak Shalev et son cousin l’écrivain Meir Shalev. Elle est mariée avec l’écrivain Eyal Megged, fils de l’écrivain Aharon Megged. Le 29 janvier 2004 , elle est victime d’un attentat suicide tout en conduisant à la suite de l’explosion d’un bus à Jérusalem alors qu’elle est sur la rédaction du roman Thèra. Dix personnes sont mortes dans l’attentat. Zeruya Shalev en réchappe mais est grièvement blessée et doit rester immobilisée plusieurs mois.

Dans une interview, elle dit en parlant de son écriture : « J’ai l’impression d’écrire comme un poète, en refusant de trop planifier, en portant une grande attention au rythme, aux métaphores, à la musique de la phrase… »

L’enfant dans le taxi de Sylvain Prudhomme. Editions de Minuit.💛💛💛💛

Une histoire d’amour dans une ferme allemande au bord du lac de Constance. Nous sommes à la fin de la seconde guerre mondiale. Une histoire d’amour entre la fermière et un soldat français.

C’est le narrateur, Simon, qui nous parle de cet amour. Qu’en connait-il réellement ? Le fantasme-t-il ? Simon est écrivain. Il a déjà écrit cette histoire.  Fiction ou secret de famille ?

De nos jours, l’enterrement du grand-père, la présence d’un oncle d’origine allemande vont révéler l’existence d’un enfant, d’un fils vivant au bord du lac de Constance.

Simon en instance de divorce, va essayer de reconstituer tout ce puzzle et de tirer les fils de ce secret. Simon en déconstruction familiale, va partir en quête des origines

Le tout avec tendresse et douceur.

L’écriture de Sylvain Prudhomme est faite souvent de longues phrases. Une phrase pouvant être un paragraphe, voire un chapitre. Ecriture pour dire les bouleversements que vit Simon.

Sylvain Prudhomme termine son roman par un mot : « Entre « 

Une ouverture

Un espoir

Une bienveillance

Tout ce qu’est ce court roman.


Sylvain Prudhomme, né en 1979 à La Seyne-sur-Mer, est un écrivain français.

Il est l’auteur de romans et de reportages, dont plusieurs ont pour cadre l’Afrique contemporaine, où il a vécu et travaillé. Sylvain Prudhomme a passé son enfance dans différents pays d’Afrique (Cameroun, Burundi, Niger, île Maurice) avant de venir étudier les Lettres à Paris, puis de diriger de 2010 à 2012 l’Alliance franco sénégalaise de Ziguinchor, au Sénégal. Il est agrégé de lettres modernes.

Sylvain Prudhomme vit à Arles. Ses livres sont traduits dans plusieurs langues. Il collabore chaque mois, depuis 2015, à la chronique « Écritures » du quotidien Libération 9.

Sylvain Prudhomme est le lauréat 2019 du prix Femina et du prix Landerneau des lecteurs pour son roman Par les routes10.


Portrait huaco de Gabriela Wiener. Métailié. 💛💛💛

Portrait huaco n’est pas un roman. Gabriela Wiener est une journaliste et éditorialiste péruvienne vivant en Espagne.
Portait huaco est son premier texte. Gabriela Wiener nous livre un texte âpre, cru, voir violent. Ce texte est servi par une écriture puissante et nerveuse.
Dans le cadre de son travail, Gabriela Wiener est à Paris et va visiter le musée du Quai Branly.
Elle est ébranlée par deux choses : d’abord par une statuette préhispanique en céramique représentant un visage indigène. Puis par le nom de la salle du Musée : Charles Wiener.
Charles Wiener qui est l’arrière- arrière-grand-père de l’autrice.
Charles Wiener est un explorateur du 19ème siècle qui a failli découvrir le Machu Picchu mais qui est surtout un pilleur d’objets inca .
Pour Gabriela Wiener c’est le début d’une recherche sur son passé et ce qu’elle est.
Réflexion sur le deuil, la famille, la bâtardise, le désir, le sexe.
Cette réflexion peut nous bousculer car Gabriela Wiener ne cache rien de ces addictions sexuelles, ni des différences de cultures, de race. Idem pour le colonialisme et le post colonialisme
Néanmoins il reste la force d’un texte vivant sur l’identité, sur nos filiations, nos dérives, nos vulnérabilités peut être.
Une découverte étonnante.
Merci aux Editions Métailié et à la Masse Critique de Babélio pour cet envoi


Gabriela Wiener, née à Lima en 1975, est considérée comme l’une des meilleures écrivaines latino-américaines de sa génération. Connue comme journaliste et écrivaine de narrative-non-fiction, son premier roman, Portrait huaco, en cours de traduction dans de nombreux pays, est considéré comme l’un des meilleurs livres parus en 2021.
Elle fait partie du groupe des nouveaux chroniqueurs latino-américains. Elle s’est installée en Espagne depuis 2003.

Et moi, je me contentais de t’aimer .Rosella Postorino. Albin Michel. 💛💛💛💛

Sarajevo 1992. La guerre des Balkans. La guerre en Europe. L’éclatement de la Yougoslavie. Il y a 30 ans.
Le siège de Sarajevo a fait 12 000 victimes dont plus de 1 500 enfants.
C’est lors de siège que Rosella Postorino démarre son roman.
Omar, 10 ans marche avec sa mère quand une explosion survient.
Cours, cours lui dit elle. Et Omar court. Seul. Sa mère a disparu.
Il se retrouve à l’orphelinat avec son frère Senadin. Au fond de lui la certitude que sa mère est toujours vivante.
A l’orphelinat il rencontrera Nada, qui arrivera à l’apaiser. Nada a un frère, Ivo qui est à la guerre.
Omar rencontrera aussi Danilo.
Omar, Nada, Danilo se promettront des jours d’avenir heureux.
Quelque temps plus tard un bus humanitaire emmènera tous les enfants de l’orphelinat vers l’Italie. Une protection loin de la guerre , mais aussi des séparations et des exils. Des instituts, des familles d’accueil, voire des adoptions.
On retrouve dans ce roman la talent évocateur et l’empathie que porte l’auteure à ces personnages comme dans son roman précédent La goûteuse d’Hitler.
Nous allons suivre Omar, Nada, Senadin, Danilo, Ivo sur une vingtaine d’années. Chacun avec son désespoir, ses espoirs. Rejet, intégration ou besoin de retour.
L’auteure ne prend pas partie, ne juge pas. Elle pose le constat.
Comment grandir sans racines ? Peut -on perdre un amour originel ?
Une saine réflexion teintée de beaucoup d’émotion sur le départ, l’exil, l’abandon, la perte, la renaissance, la résilience.
Blessures et espoirs.

Née à Reggio de Calabre en 1978, Rosella Postorino a grandi à San Lorenzo al Mare, en Ligurie. En 2002, elle a déménagé à Rome. En 2004, elle a publié sa première nouvelle In una capsula dans l’anthologie Ragazze che dovresti conoscere, et en 2007, elle a publié son premier roman La stanza di sopra3.

Elle a traduit et édité quelque œuvres de Marguerite Duras.

Avec le roman Le assaggiatrici (Feltrinelli 2018) (La goûteuse d’Hitler), elle remporte la 56e édition du prix Campiello4, le prix Luigi Russo5, le prix Rapallo-Carige6 et le prix Vigevano Lucio Mastronardi. La traduction française de son roman a remporté le 25e Prix Jean Monnet lors du LEC Festival 20197

Croix de Cendre d’Antoine Sénanque. Grasset. 💛💛💛💛💛

Parlons d’abord de l’auteur avant de parler du roman .
Quelle maestria d’Antoine Sénanque pour nous conter Croix de cendre.
La bibliographie à la fin du roman est courte : 4 livres. Comme on dit ce n’est pas la quantité qui fait la qualité.
Et là la qualité est présente à chaque page . Un travail documentaire, historique, religieux, spirituel de haute volée.
Car Antoine Sénanque n’a pas choisi une période simple pour son roman : le Moyen âge religieux. On aurait vite fait de se perdre aux confins des années 1350.
La peste a envahi l’Europe. Depuis peu des ordres religieux viennent de naître. Les Dominicains et les Franciscains courent les routes et les chemins entre prédication et pauvreté. La papauté est installée en Avignon avec Jean XXII. L’empereur Frédéric Barberousse règne sur l’Allemagne , la Thuringe et le Nord de l’Europe. le pouvoir papal et le pouvoir politique se disputent Dieu. L’Inquisition s’installe. Elle s’attaque aux Albigeois, aux Cathares, aux Templiers mais aussi aux béguinages ou encore aux Dominicains qui s’écartent de la ligne tel Maitre Eckhart qui professe le Libre Esprit. L’hérésie gagne le monde
Epoque semble-t-il confuse où les pouvoirs terrestres et célestes sont prêts à toutes les turpitudes.
Et de ce maelstrom , Antoine Sénanque en fait un polar médiéval. Bluffant.
En voici la trame.
Près de Toulouse dans le monastère de Verfeil, Antonin fils de médecin est dominicain. Il connait les plantes qui soignent. Il a comme ami, Robert, fils de valet de ferme et moine peu cultivé.
Le prieur du monastère, Guillaume, leur demande de se rendre à Toulouse afin de récupérer un vélin afin de fabriquer un parchemin. Parchemin d’importance car Guillaume souhaite y écrire une confession.
A leur retour , Antonin écoutera les confessions de Guillaume et les couchera sur le parchemin.
Alors plus jeune Guillaume a connu et accompagné Maitre Eckhart sur les routes de l’Europe. Celui-ci écrivant et professant des sermons provocants et dangereux. Il accompagna Eckhart à la Sorbonne, à Strasbourg mais aussi par dessus les mers jusqu’en Crimée.
Les révélations que pourraient faire Guillaume inquiète l’Inquisiteur général Louis de Charnes.
La suite est le plaisir de la lecture et de l’écriture. de religieux et politique, le roman devient polar. Il se savoure avec délectation.
Si en plus vous mettez dans vos oreilles quelques chants grégoriens , ou chorale de moines , le poème du Long Désir de Mathilde, béguine de Ruhl, en exergue du livre vous transportera.
Magnifique coup de cœur de cette rentrée littéraire.


Antoine Sénanque est né en 1959, à Neuilly sur Seine. De sa carrière d’interne chef de clinique, il tire un premier roman coup de poing, « Blouse », brûlot acéré contre la médecine qui lui vaudra la reconnaissance du public autant que les foudres de ses pairs.

En 2007, il reçoit le prix Jean Bernard pour son second ouvrage, « La Grande Garde ». Neurologue expérimenté, il parvient à rendre palpable la tension d’un service de chirurgie et dépeint les rapports de pouvoirs au sein du monde hospitalier. L’écriture de Sénanque est chirurgicale, précise, brutale et sans concession, pleine d’humeur et d’humour, toujours.

En 2006-2007, Antoine Sénanque change de cap pour passer sur le tard une licence d’histoire à la Sorbonne, expérience qui lui inspirera « L’ami de Jeunesse », sorti en 2008 et pour lequel il reçoit le prix Découverte Figaro. D’Histoire, il est aussi question avec « L’Homme mouillé », récit singulier où s’entremêlent mythologies anciennes et esprit scientifique, suivant les aventures de son anti-héros, Pal Vadas. Une percée dans les aspirations spirituelles d’Antoine Sénanque qui se poursuit avec son nouveau roman paru en mai 2012, « Salut Marie ». L’auteur y fait jaillir de sa plume truculente le questionnement insolent et subtil d’un personnage ordinaire et morose confronté à l’apparition de la Vierge Marie.


La Foudre de Pierric Bailly. P.O.L 💛💛💛💛

La foudre est ma première rencontre avec l’univers de Pierric Bailly. Cette première rencontre fut un grand moment d’émotion et de plaisir.
La foudre est un roman à l’ancrage social et géographique très fort. La comparaison avec les livres de Nicolas Mathieu ancré en Lorraine est évident.
Avec Pierric Bailly nous sommes à la frontière franco-suisse dans le Haut Jura. Entre Valserine, Vallée de Joux et hauts pâturages Julien vit une vie simple. L’été il est berger sur les flancs du Col de la Faucille. Il vit avec un troupeau de 300 brebis, ces 2 chiens , Mistral et Flash et ces deux patous. L’hiver il est saisonnier à la station des Rousses.
Toute sa famille est originaire de ce creuset jurassien. Il a une une dévotion particulière pour son grand père John , mémoire des alpages , des personnes et des alpages.
D’ailleurs Julien est plus connu par son surnom : John.
Il a comme compagne Héloïse , qui est professeur d’anglais dans la vallée.
Celle-ci vient d’accepter une nouvelle affectation à La Réunion. Julien-John finit donc sa dernière de berger dans les Alpages, ensuite direction l’Océan Indien.
Dans le chalet d’alpage, il y a des vieux journaux et son regard est accroché par un article. Alexandre Perrin, vétérinaire, vivant dans le Rhône a tué à coup de planches un jeune homme. le journal date d’il y a un an.
Alexandre Perrin est un ancien copain de lycée de John. Rien ne le prédisposait à cet acte.
John va faire des recherches et trouver les coordonnées de la femme d’Alexandre, Nadia.
Il envoie un SMS à Nadia pour lui dire sa stupéfaction
Longtemps il n’y aura pas de réponse et puis un jour Nadia rentrera en contact avec John.
L’histoire est en place. Pierrick Bailly convoque les hautes terres jurassiennes, des personnages issus de la classe moyenne , des personnages et des générations issus de ce creuset jurassien. Tous se connaissent. Ils ont maintenant la petite quarantaine mais ils ont les souvenirs communs du collège, du lycée , du ski, des alpages.
Et dans ce creuset commun , arrive l’intrusion , l’imposture, la force du lien , l’amour peut être l’impossible amour.
Le style de Pierrick Bailly est faussement simple. le présent de l’indicatif constamment présent cache les souvenirs et les détails qui donnent vie à ce roman.
De cette proximité naît les émotions et le plaisir intense de la lecture.
Mais La foudre va frapper !


Pierric Bailly passe son enfance à La Frasnée, à Poids-de-Fiole et à Lons-le-Saunier1. Après des études secondaires à Lons, il s’installe à Montpellier où il suit des cours de cinéma à l’université Paul-Valéry. Il revient ensuite dans le Jura où il travaille en usine, vit quelque temps en région parisienne, à Grenoble et à Nîmes, avant de se fixer à Lyon.

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Destination Orion d’Olivier Berne. Dunod. 💛💛💛💛

Il y a deux ans Ariane 5 a envoyé dans l’espace le télescope spatial James Webb. Celui-ci s’est mis en orbite à 1,5 million de kilomètres de la Terre. Il fonctionnera pendant 5 ans et répercutera ses images de l’Univers auprès de 50 programmes sélectionnés.
Parmi ceux-ci le projet d’ Olivier Berné, directeur de recherche au CNRS et astrophysicien.
Le projet d’Olivier Berné est de pouvoir photographier la nébuleuse d’Orion située dans la Constellation du même nom.
La nébuleuse d’Orion est une pouponnière de jeunes étoiles.
En 160 pages, divisées en court chapitre , Olivier Berné va écrire un véritable thriller spatial.
Thriller car nous allons suivre la mise en place du programme avec les aléas des relations avec la Nasa. le programme d’Olivier Berné sera -t -il retenu ?
Thriller sur la construction du télescope et sur son envoi en orbite.
Thriller sur la réussite ou non de l’envoi des premières images. Qu’en sera t il ? Que verra Olivier Berné et son équipe de la nébuleuse d’Orion.
C’est captivant et magique de bout en bout.
A ce polar, Olivier Berné ajoute des réflexions salvatrices sur la science , le rôle de l’Etat, le rôle de la Nasa et les risques que comporte notre économie libérale. La science doit rester aux chercheurs et ne peut être aux mains des décideurs.
Ces jours ci il a été révélé qu’Elon Musk est intervenu avec son système Starlink dans la guerre en Ukraine. Tout comme ces trains de satellites en basse orbite qui polluent l’atmosphère et transforme l’excellence et la qualité en quantité et finances. A méditer
Je remercie Babelio et Dunod pour l’envoi du livre . j’aurai le privilège de participer par Zoom à une rencontre avec l’auteur.


Olivier Berné est astrophysicien au CNRS, à l’institut de recherche en astrophysique et planétologie de Toulouse. Ses travaux concernent la spectroscopie infrarouge des régions de formation stellaire et planétaire. Il est responsable d’un des programme d’observation « Early Release Science » sur le télescope spatial James Webb dont le lancement est prévu fin 2021. Il a co-fondé avec Tamara Ben Ari le collectif Labos 1point5 qui rassemble plusieurs centaines de scientifiques en France et dont l’objectif est de réduire l’empreinte environnementale de la recherche.