Où les étoiles tombent de Cédric Sapin-Defour. Stock. 🟩🟩🟩🟩◼️

Où les étoiles tombent

Cédric Sapin-Defour

Stock

ISBN :978-2-234-09700-1 Août 2025

396 pages

Son odeur après la pluie avait été un coup de coeur émotionnel et c’est non sans appréhension que je me lançais dans la lecture de Où les étoiles tombent de Cédric Sapin Defour. Appréhension car le livre semblait être de la même veine (même filon) que Son odeur après la pluie.
Dans le premier livre, la perte du chien Ubac et sa vie retracée. Dans le deuxième livre, l’accident très grave de sa femme Mathilde et l’épreuve retracée.
La justesse du propos de Cédric Sapin Defour et la vérité de celui-ci éteignent dès les premières pages cette appréhension.
Le vendredi 12 août 2022, Cédric et Mathilde s’adonnent au parapente dans une vallée italienne à Bolzano. Chacun a décollé à quelques secondes d’écart. Les rotations ont commencé afin de monter dans les thermiques. Les regards se trouvent au détour d’une rotation et puis Cédric perd de vue la voile de Mathilde. Elle gît au sol dans les rochers.
Cédric se pose en catastrophe et court vers le lieu de l’accident. A-t-elle survécu et que faire ?
Le récit découpé en scènes de l’accident et en scènes d’hospitalisation est rythmé par les J des jours passés et des jours présents.
C’est le roman vrai d’un couple face à l’accident, la mort, la séparation ; la perte, le handicap.
Ce roman vrai nous est raconté et ressenti par Cédric. L’urgence est là, les inquiétudes s’installent.
L’écriture et le style sont simples, sans fioritures. le coeur parle humblement et humainement.
Où les étoiles tombent est un hymne à l’amour, à la fidélité, à l’engagement et à l’attachement.
D’une histoire qui aurait pu être voyeurisme, il en fait une réflexion universelle.
Dans une interview à Ouest-France, Cédric Sapin-Defour dit : « Le degré émotionnel de ce que j’ai vécu était tellement fort que ces moments ont convoqué tout ce que j’avais construit, toutes mes expériences. Je crois très fort à la bienveillance, à la sensibilité des êtres, même si chaque jour me démontre le contraire. Pourtant, quand tu es dans le dur, il y a des personnes, des anonymes, qui sont là. le plus grand mal que causent les cyniques, c’est de nous rendre hésitants dans notre capacité à exprimer notre contentement, notre reconnaissance, notre gratitude. »
C’est ce que j’ai ressenti profondément en suivant la reconstruction de Mathilde et Cédric Cette justesse, cette bienveillance font un bien fou malgré le drame vécu.

Né à Saint-André-des-Vergers, dans l’Aube, en 1975, Cédric Sapin-Defour ne fait qu’y passer, suivant ses parents enseignants d’éducation physique et sportive au gré de leurs mutations professionnelles. C’est de grand air dont son frère aîné et lui sont baignés toute leur enfance, avec un goût familial prononcé pour les activités de pleine nature. Dans le Nord ensuite, la maison est une auberge espagnole réunissant joyeusement tous les autres profs de gym exilés de l’intérieur. De cela, l’intéressé conserve le sentiment d’être de nulle part et les plaisirs d’une vie en bande, avec les week-ends et les vacances consacrés au sport.

Au hasard de la visite familiale de hauts lieux naturels, Cédric Sapin-Defour découvre un jour, il a alors 8 ans, Chamonix et l’aiguille du Midi. C’est un choc esthétique. Ce jour-là, précisément, il est entré en alpinisme, observant ce qu’il considérait être des astronautes allant vers des jeux et des territoires inconnus mais dont il pressentait qu’ils mêlaient tous les bonheurs de la vie, l’engagement, la beauté et la camaraderie. La montagne ne le quittera plus. Loin d’elle, il en découvre le récit et cette vertu magique du mouvement immobile, de l’élan. Le goût des mots et de la littérature d’exploration, aussi, s’installent pour toujours. Les mutations vont répondre à cette aspiration : la famille s’installe à Oyonnax en 1986, à proximité des Alpes.

Dans l’Ain, Cédric Sapin-Defour poursuit une scolarité acceptable sans être flamboyante, le nez à la fenêtre. Après s’être égaré trop longtemps dans un cursus de médecine, il en revient à ses premières amours en devenant enseignant d’EPS, tradition familiale oblige. Temps libre et autonomie financière le poussent vers les montagnes où se confirme cette dépendance à la cinétique du corps et de l’esprit. Escalade, alpinisme, ski de randonnée? C’est en pratiquant curieux et généraliste qu’il entreprend de découvrir l’univers vertical avec une préférence pour la douceur et les vertiges du ski. Envisageant un temps de devenir guide de haute montagne, il se ravise pour se recentrer sur une pratique alpine personnelle à laquelle il consacre l’essentiel de son temps et de son énergie. Il trouve, très tôt dans son cursus vertical, un autre moyen d’emmener les autres en montagne. C’est en leur rapportant des récits de là-haut, ses émerveillements, ses interrogations, des parallèles sans cesse tissés entre la montagne et la vie. Son intention est d’inviter le plus grand nombre à goûter aux joies et aux frissons des sommets. Il peste contre l’iniquité du monde et l’impossibilité pour beaucoup de connaître les bonheurs de cette rencontre tellurique.

Cédric Sapin-Defour pratique intensément les activités de montagne, avec son épouse Mathilde, elle aussi professeur d’éducation physique, comme compagnon de cordée et de vie : leur camp de base est, depuis 2005, établi à Arêches dans le Beaufortain, avec moult bouviers bernois et labradors autour d’eux. Et c’est à Beaufort que le professeur d’EPS enseigne, intimement persuadé que les nouvelles générations ne sont pas devenues subitement insensibles aux choses du mouvement et au goût des autres.

Cédric Sapin-Defour écrit, beaucoup. Articles et chroniques dans journaux et des revues (LibérationMontagnes Magazine, « Ça pic » et « Prises de tête » dans Alpes MagazineSport et vieLes Others), essais et livres, notamment pour Guérin/éditions Paulsen. La montagne est là, toujours, décor ou personnage, mais comme pour mieux préciser l’existence, ses pics et ses creux, comme pour mieux comprendre les hommes, leurs forces et leurs fêlures. Au-delà de la montagne, ce sont les grands espaces qui l’attirent, ces lieux nous rappelant à notre petitesse mais nous autorisant à y grandir, ces territoires où la nature résiste et nous enseigne les directions. De plus en plus, ses écrits s’écartent de la seule verticalité pour l’audacieuse idée d’embrasser le monde.

Cédric Sapin-Defour et son épouse ont un projet de voyage au long cours, itinérance de massifs en massifs, de grands espaces en grands espaces pour témoigner des beautés fragiles de notre monde et l’urgence de changer nos modes de vie. Départ imminent, l’œil ouvert et le carnet dans la poche? ( Biographie de Transboréal)

Mais où vont les poussières de Christophe Carrées. Les Editions du cerf. 🟩🟩🟩◼️◼️

Mais où vont les poussières

Christophe Carrées

Les Editions du Cerf

ISBN : 978 – 2 – 204 – 17037 – 6 Août 2025

190 pages

Mais où vont les poussières est le premier roman de Christophe Carrées, graphiste et photographe.

Ce roman est la chronique de quatre décennies d’une existence simple et banale. Cette existence est racontée par ellipses, par touches. Comme un photographe ou un graphiste. Comme dit en quatrième de couverture, on pourrait imaginer cette vie taguée ou graffée sur les murs de nos villes.

Pour représenter en écriture ces ellipses et grafs, Christophe Carrées a imaginé des chapitres avec des flashs d’écriture autour d’un mot, d’une phrase.

Les chapitres nous rappellent la banalité et les difficultés de l’existence : vestiges – vétilles – rebuts – rognures – salissures – ruines – reliques.

Un roman du gris, qui se lit comme un manifeste.

Mais pour moi c’est aussi la limite de cette écriture et de son pouvoir. À vouloir être grinçant, le propos peut devenir excessif et devenir une plainte.

Cheistophe Carrées les appelle mes histoires.

Il continue en écrivant : « L’univers les appellerait mes mensonges. Pourtant ces fables ne sont les causes de rien qui m’advient. Elles sont les conséquences du tout qui m’entoure, la vie des autres, leurs silences, leurs secrets, leurs saccages. »

La conséquence est produite nécessairement par quelque chose qui en est la suite logique. Il est dommage que l’auteur suive cette logique. Il me semble que les poussières ont une grande liberté pour se déposer ou pour se cacher dans les coins les plus obscurs. Et puis à contre du jour du soleil, elles volètent, lumineuses.

Merci aux Éditions du Cerf pour l’envoi de livre.

Et merci à Christophe Carrées pour la dédicace.

Christophe Carrées est photographe et graphiste. Il oeuvre aussi dans le mode lu livre. Mais où vont les poussières est son premier roman.

La Mystification indienne de Jean-Claude Perrier. Les Editions du Cerf. 🟩🟩🟩🟩◼️

La mystification indienne

Jean-Claude Perrier

Les Editions du Cerf

ISBN : 9782204157223 Mai 2025

213 pages

La Mystification indienne est le nouveau récit, essai de Jean-Claude PerrierJean-Claude Perrier est un écrivain journaliste aux prix multiples et passionné par l’Inde.
La mystification indienne est l’histoire d’une imposture. Celle d’Octave Mirbeau. Nous sommes en 1885. Octave Mirbeau, jeune journaliste et futur écrivain, s’embarque pour l’Inde.
« Rien n’est curieux comme une ville de l’Inde, ensommeillée, aux premières heures crépusculaires du jour. » Lettres d’Inde – Octave Mirbeau.
Les Lettres d’Inde, écrites dans deux journaux, regorgent de descriptions venant du Sri Lanka, de Pondichéry, du Tamil Nadu ou encore de l’Himalaya et du Sikkim.
On y est : les odeurs, les senteurs, la foule, les couleurs, le bruit, la colonisation. Et pourtant tout est inventé. Octave Mirbeau n’a jamais quitté la France.
la peinture avait le Douanier Rousseau qui a peint la jungle depuis le Jardin des Plantes.
La littérature aura Octave Mirbeau. Remarquez, on est à la même époque.
Jean-Claude Perrier s’est mis dans les pas de son prédécesseur et a fait le voyage en Inde afin de démêler le vrai du faux. Entre pérégrinations et réflexions, Jean-Claude Perrier nous parle de l’époque d’Octave Mirbeau, fervent dreyfusard, et du monde du journalisme. Mais il nous rappelle que les affabulations sont souvent proches de la réalité.
Et ce que retranscrit Octave Mirbeau raconte l’hindouisme, le bouddhisme, la colonisation anglaise, les comptoirs français avec beaucoup de véracité. On reste ébahi devant le talent de reporter d’Octave Mirbeau pour nous entretenir de la culture, et de la richesse d’une civilisation millénaire.
J’ai eu la chance de voyager au Sri Lanka, en Inde du Sud, au Népal et en Birmanie. J’ai retrouvé dans le voyage imaginaire d’Octave Mirbeau et le récit de Jean-Claude Perrier l’essence de ces différents pays, leurs particularités mais aussi le creuset de l’hindouisme et du bouddhisme. Et la gentillesse de ces peuples.
Si vous connaissez le sous-continent indien, laissez-vous porter.
Si vous ne connaissez pas, alors partez sur les traces d’Octave Mirbeau. C’est un excellent guide !

Je remercie les Éditions du Cerf pour l’envoi de ce livre.

Jean-Claude Perrier naît le 3 février 1957 à l’hôpital Rothschild, dans le 12e arrondissement de Paris.

Ayant débuté au Quotidien de Paris en 1980, il collabore aujourd’hui au Figaro littéraire, à Livres-Hebdo, au Magazine littéraire, à L’Obs et à L’Orient-Le Jour.

Il dirige également, aux éditions du Cherche midi, la collection « Domaine indien ». Il est, enfin, membre du jury du prix Senghor du premier roman francophone et francophile.

En matière littéraire, ses inspirations sont notamment André GidePierre LotiAndré Malraux et Henri Michaux

En 2013, candidat au fauteuil 2 de l’Académie française, laissé vacant par Hector Bianciotti, il recueille quatre voix contre treize à Dany Laferrière, trois à Catherine Clément et une à Arthur Pauly. En 2016, il réitère au fauteuil 5 de feue Assia Djeba], avant de retirer sa candidature quelques jours plus tard]. Il est de nouveau candidat en 2021 au fauteuil de François Weyergans

Trois enterrements de Anders Lustgarten. Actes Sud. 🟩🟩🟩🟩◼️

Trois enterrements

Anders Lustgarten

Actes Sud

Traduction de Caro

ISBN : 978-2-33020-883-7 Septembre 2025

304 pages

Trois enterrements est un récit à plusieurs voix, tragique et sans illusion sur le monde et la brutalité des politiques migratoires.

Sept exilés ou migrants veulent quitter les côtes françaises pour rejoindre l’Angleterre. Parmi ces migrants, il y a Omar, jeune homme de 18 ans, sportif qui veut rejoindre Asha en Angleterre. Asha, 17 ans, son amoureuse. Il garde précieusement sa photo dans son blouson.

Avec Omar et Asha, le roman donne voix à Andy Jakubialk, policier enrôlé dans une milice raciste menée par Baratt et Cherry, infirmière qui, après une nuit de garde, est confrontée à la dépouille d’un jeune homme sur une plage anglaise.

Par des chapitres alternés entre chacun de ses personnages, Anders Lustgarten d’une écriture précise, tendue, trouve une justesse remarquable dans la brutalité quotidienne, la loyauté ou le refus d’agir. L’auteur dans les remerciements nous dit qu’il écrit vite. Cela se ressent. Il y a une urgence dans l’écriture, entre classicisme et oralité. Il y a aussi la volonté de dire les préoccupations sociales et les prises de conscience politique à venir.

La dernière phrase du roman nous ramène à la situation initiale : « Ils s’élancent dans l’avenir. »

Le roman nous détaille cet avenir ou ces avenirs selon les personnages. Et l’on peut imaginer que tous les jours des jeunes migrants s’élancent dans l’avenir, tout comme ceux qui les aident, ceux qui les refusent, ceux qui les aiment, ceux qui les politisent. Ils s’élancent dans l’avenir qui est le nôtre. Cet avenir est-il l’un des trois enterrements ? Poser la question vaut réponse.

Livre lu dans le cadre du jury du Livre 2025 de la librairie Au bord du jour à Voiron-Isère.

Anders Lustgarten est un dramaturge britannique résidant à Londres.

C’est en 2007 qu’il se tourne vers l’écriture dramatique ; ses premières pièces sont produites au Finborough Theatre.

Il a notamment remporté le Harold Pinter Playwrights Award, commandé par la Royal Court, en 2011.

Il travaille actuellement sur deux séries radiophoniques pour BBC Radio Four et sur un pilote d’émission de télévision pour Channel Four.

Parallèlement à son activité d’écrivain, Lustgarten milite politiquement à travers le monde, se concentrant sur les actions des multinationales dans les pays en développement.

La petite zone avec de la lumière de Sébastien Ménestrier. Editions Zoé. 🟩🟩🟩◼️◼️

La petite zone avec de la lumière.

Sébastien Ménestrier

Editions Zoé

ISBN : 978-2-88907-4-808 Août 2025

128 pages.

Bastien vient de sortir de Saint-Louis, en haut de la colline. Burnout, dépression, problèmes psychologiques. Il retrouve la rue, les gens, le travail, et surtout la famille. Sa mère Coco, sa soeur Anouk au corps blessé, son fils Nino et son ex Fanny.

Pour son retour à la vie et au travail, Bastien est embauché comme AESH (accompagnateur d’élève en situation de handicap) auprès de Thomas.

Par fragments, entre novembre 2018 et mars 2019, Sébastien Ménestrier va nous entrainer dans La petite zone avec de la lumière.

La petite zone avec de la lumière est un vers de Sandra Lillo.

« Tu ne me vois pas, alors je te le dis.

J’écris.

Je suis dans la petite zone avec de la lumière. »

Écrire, un échappatoire pour Bastien et pour relier les fragments de sa vie.

Dans ce cours roman, Sébastien Ménestrier va décrire la reconstruction de Bastien avec violence ou délicatesse. Cette reconstruction rassemble un trop-plein de thèmes qui finissent par parasiter le propos. Entre l’accident d’Anouk, la colère de la rue, les gilets jaunes, les retrouvailles familiales, les fragments se diluent un peu, beaucoup. Néanmoins reste une petite musique, une poésie, qui parlent de l’intime et de l’humain. Simplement.
Roman lu dans le cadre du Prix du livre 2025 de la librairie Au bord du jour – Voiron- Isère. Jury

Sébastien Ménestrier est né en 1979. Pianiste et enseignant, il met en scène des personnages dont la fragilité intérieure fait mouche et donne leur grâce brute à ses livres: Où la chanson va (Zoé, 2023), Le chant de Shilo (Zoé, 2022) et Pendant les combats (Gallimard, 2013), finaliste du Goncourt du premier roman et lauréat du festival de Chambéry.

Voyage voyage de Victor pouchet. L’arbalète Gallimard. 🟩🟩🟩🟩◼️

Voyage voyage

Victor Pouchet

L’arbalète Gallimard

ISBN : 978 – 2- 07311 – 908 – 7 Août 2025

192 pages

Embarquez avec Victor Pouchet. Acceptez de partir. Laissez vos préjugés. Croyez à la poésie, aux rêves, à l’amour.

Orso et Marie s’aiment mais leur quotidien se fracasse sur un chagrin brutal, existentiel. Que faut il faire ? Assumer, subir, prendre un chemin de côté.

Orso imagine un road trip en France avec comme idée, la visite de musées insolites : musée des Poids et mesures, musée du Fer, de l’Amiante, musée de la Gendarmerie, musée du Pigeon.

Ce road trip muséal va rythmer notre connaissance de la vie de Marie et Orso et nous faire découvrir l’origine de ce chagrin brutal. L’écriture délicate de Victor Pouchet nous entraine sur les chemins de l’école buissonnière entre tendresse, amour et résilience.

Qui n’a jamais pensé tout laisser et partir, faire un pas de côté ? Un pas de côté pas toujours maitrisé mais diablement libre. Une thérapie sur les chemins de traverse pour Marie et Orso.

Il fut agréable de voyager aux côtés de Marie et Orso. Il sera toujours temps de rentrer à la maison.
Livre lu dans le cadre du Prix du livre 2025 de la librairie Au bord du jour – Voiron – Isère. Jury

Victor Pouchet est né le 8 mai 1985 à Paris. Agrégé de lettres modernes, ancien élève de l’École normale supérieure de Lyon après une khâgne au lycée Fénelon de Paris, il commence une thèse sur les descendants de Stendhal dans la critique au XXe siècle, puis l’abandonne pour commencer à Brest, avec deux amis, un « Tour du Monde de France de Bretagne » à pied par étapes annuelles, prévu pour s’achever en 2060. Il a été programmateur à la Maison de la Poésie de Paris entre 2013 et 2024.

Son premier roman, Pourquoi les oiseaux meurent , raconte une enquête sur une pluie d’oiseaux morts survenue dans la banlieue de Rouen. Publié aux éditions Finitude, il a reçu le Prix littéraire de Trouville.

Son deuxième roman, Autoportrait en chevreuil  est paru en 2020 aux éditions Finitude. Il figure dans la sélection du prix du Roman des étudiants France Culture-Télérama  et a reçu le prix Prix Blù Jean-Marc Roberts et le Prix Jesus Paradis .

On m’a jeté l’oeil de Anya Nousri. Le Castor Astral. 🟩🟩◼️◼️◼️

On m’a jeté l’oeil

Anya Nousri

Le castor Astral

ISBN : 978 – 2 – 89801 – 211 -2 Avril 2024 ( Montréal) Août 2025 ( Paris)

117 pages

On m’a jeté l’oeilAnya Nousri est un premier roman qui ne laisse pas indifférent sur la forme. Comme il est indiqué en note d’éditeur : « Afin de respecter l’intention de l’autrice, et proposer une expérience de lecture radicale, les termes arabes, kabyles et créoles ne sont pas traduits. »

Le roman est irrigué par une langue pluriethnique passant du français au verlan, au kabyle, au québécois. Cette radicalité de la forme m’a fortement perturbé et m’a empêché de m’attacher au fond du roman qui se veut lui aussi radical et subversif.

L’autrice aborde la charge culturelle, féminine, sexuelle et identitaire d’une jeune femme algérienne aux prises avec les différentes cultures qu’elle traverse. Comment être une femme libre quand on est ballotée entre traditions kabyles, mercantilisme occidental, réseaux sociaux et place de la femme.

Des interrogations importantes, essentielles. Malheureusement pour moi, la forme a pris le dessus et celle-ci a supplanté ces interrogations.

Souvent la radicalité empêche le dialogue, la compréhension. Cette radicalité est aussi un cri, un besoin de reconnaissance. Je les ai entendus mais je n’ai pu les atteindre.
Lu dans le cadre du prix de la librairie Au bord du jour ( Voiron – Isère ) . Jury

L’autrice Anya Nousri a récemment remporté le Grand Prix du livre de la Ville de Sherbrooke, dans le volet création littéraire, pour son premier roman, On m’a jeté l’oeil, publié aux éditions Triptyque. Un roman court, incisif, poignant.

L’autrice est née à Montréal, de parents algériens, mais elle étudie depuis deux ans à l’Université de Sherbrooke. La narratrice de son histoire navigue entre traditions et rationalité, entre superstitions et soif de liberté. Ce personnage-là, même si elle a ses réticences face à sa posture occidentale, elle s’y plonge quand même dans ces rituels. Même si elle dit qu’elle n’y croit plus, ce personnage souhaite chérir cet héritage, explique Anya.

Anya Nousri est un nom d’emprunt. Quand j’ai écrit ce livre, j’avais vraiment envie d’écrire tous les enjeux et toutes les nuances dont j’avais envie de parler, et de le faire avec toute la liberté possible, affirme l’autrice, qui s’est également créé un personnage, question de briser les codes.

Il faut le dire, Anya arbore un style assumé qui peut surprendre. Qui intrigue, à tout le moins. Elle porte des vêtements colorés et un masque perlé.

Et brûlent les enfances de Virginie Noar. Les Pérégrines. 🟩🟩🟩🟩🟩

Et brûlent les enfances

Virginie Noar

Les Pérégrines

ISBN : 979 – 1 – 02520 – 673 – 7 Août 2025

222 pages

Et brûlent les enfances de Virginie Noar est un coup de poing, un coup de coeur. Et brûlent les enfances, raconte la réalité d’une famille rattrapée par des renoncements, des cruautés. Et Virginie Noar nous délivre cela à hauteur d’enfant.

Alice, enfant de huit ans à l’époque, nous rapporte un récit à la mémoire incomplète. Alice est la narratrice principale. Il existe un autre narrateur. Celui-ci est un regard, un oeil, une photographie.

Ce regard, cet oeil vont régulièrement planter le décor : une chambre, un bureau, les détails d’une cuisine et puis une carte postale de la tour Eiffel.

Dans cette chambre Alice y cache ses silences. Dans un coin de la chambre, son petit frère dort. Alica a deux petits frères, Baptiste et Samy. Dans cet appartement populaire, il y a aussi Annick, la maman. Celle-ci a quitté son mari, et est partie avec ses trois enfants pour cet appartement populaire.

Un jour, Annick présente à ses enfants Adama. Alice et ses frères l’accueillent avec joie et espoir. Et puis arrive la naissance de Marie et Alice, qui nous dit : « Avant Marie, la vie ressemblait à une errance infinie sur terrain vague, grands espaces et pâle caillasse. Certain de trouver quelque chose de valable au bout du chemin rocailleux, je ne rêvais qu’à cette petite soeur qui viendrait un jour ou l’autre embellir les ennuis. Au fond, il s’agissait sûrement du désir de conserver l’enfance, paradis perdu et tout le tintouin, acte désespéré contre le temps déployant à toute vitesse ses emmerdes et ses rides. »

Le bonheur ne durera pas. Chacun va devoir composer avec un délitement familial. Alice, en grande soeur, va protéger au mieux ses frères et sa jeune soeur de cette vie devenue précaire.

Virginie Noar nous transporte et nous émeut auprès de cette famille cabossée, où l’amour reste présent. Les failles, les secrets, les difficultés se retrouvent dans les gestes anodins du quotidien et dans l’exigüité d’un appartement.

Virginie Noar nous touche par la finesse psychologique des personnages, par la justesse des situations et le regard que porte Alice sur le monde qui l’entoure.

Son écriture au plus près des personnages est simple, fluide et tellement juste. Elle nous rappelle ce que l’enfance recèle de non-dits et de traumatismes à venir. Un roman brûlant que l’on referme entre tendresse et violence, en gardant en mémoire les (nos) parts d’enfance volées.
Lu dans le cadre du Prix Livre 2025 de la librairie Au bord du jour – Voiron – Isère. Jury.

Virginie Noar, pigiste et travailleuse sociale, a trente-cinq ans. Elle exerce dans un espace de rencontre parents-enfants. Le Corps d’après est son premier roman. Elle réside en Ardèche, à Joyeuse.

La hideuse de Reine Bellivier. Christian Bourgeois Editeur. 🟩🟩◼️◼️◼️

La hideuse

Reine Bellivier

Christian Bourgeois Editeur

ISBN : 978 – 2 – 26705 – 535 – 1 Août 2025

198 pages

La Hideuse est le premier roman de Reine Bellivier. Premier roman sous forme d’enquête qui peut supposer une part autobiographique.
A la fin des années 1950, dans un bourg des Deux Sèvres, Marguerite, mariée et mère de trois enfants, quitte le domicile familial et disparaît sans un mot.
Des années plus tard, sa fille, la narratrice, enquête pour comprendre les raisons et les circonstances de cet événement.
Cette enquête va permettre de confronter les bribes de l’histoire et comprendre peut être les raisons de la disparition de Marguerite.
Cette enquête va aussi mettre en lumière la condition féminine dans les années 1950 et le besoin d’émancipation en n’étant pas seulement  » l’ange du foyer »
La narratrice va aussi s’appuyer sur des textes indices littéraires qu’elle trouvera chez Virginia Woolf ou Emil Ferris.

L’écriture du livre et la structure de celui-ci est ambitieuse. Malheureusement cette ambition se heurte pour moi à une confusion dans la lecture et la compréhension.
Je me suis lancé dans la lecture des premières pages du roman et j’ai du faire machine arrière et recommencer car je ne rentrais pas dans l’écriture et l’histoire.

Je suis donc resté un peu extérieur au roman malgré ses qualités de style et d’écriture.
Le titre du roman La hideuse m’interroge. Hideux ou hideuse est dit d’une personne d’une laideur repoussante ou moralement ignoble ou affreuse ( définition Larousse )
Dans l’ouvrage Reine Bellivier nomme les maris ou compagnons de sa mère : le Premier, l’Autre.
La hideuse caractérise semble-t-il Marguerite. Est-il possible que sa fille qui enquête sur sa mère ait cette impression. Où est-ce ce que ressentent les personnes ayant connu Marguerite.
 » Finalement la seule victime ici, c’est la fée du logis, l’ange du foyer. Est -ce que le prix a été payé ? oui, je crois. « 

Livre lu dans le cadre du Livre 2025 de la librairie Au bord du jour – Voiron – Isère

Reine Bellivier est née en 1982 et vit à Nantes. Son enfance a été marquée par le bocage des Pays de la Loire et plusieurs longs séjours à l’étranger. Après des études de lettres, elle coordonne des projets éditoriaux en indépendante. La Hideuse est son premier roman.

Marathon de Nicolas Debon. Dargaud. 🟩🟩🟩🟩◼️

Marathon

Nicolas Debon

Dargaud

ISBN : 978 – 2- 20507 – 821 – 3 Juin 2021

120 pages

Marathon, sorti en 2021, est un roman graphique de Nicolas Debon. Ce roman graphique retrace le marathon de 1928 aux jeux Olympiques d’Amsterdam.
La couverture du roman graphique résume parfaitement cette BD.
Un énorme bâtiment ,bétonné, quelques drapeaux. le tout dans des couleurs sombres, rouge orangé, sépia.
Et puis au bas de ce paquebot architectural une ribambelle de coureurs, la foulée ample . Les marathoniens qui sortent du stade.
Vous avez là les trois forces principales du roman. La quatrième , le petit algérien frêle ( français du fait de la colonisation), mécano à Billancourt et vainqueur du marathon apparaitra petit à petit.
Tout le roman sera fait de ce rouge, orangé sombre , mangé par ces bâtiments reconstruits à la fin de la première guerre.
Et puis il y a surtout la cohorte des marathoniens. Nicolas Debon nous plonge dans leurs courses. Que ce soit les américains sûrs d’eux, un chilien, un japonais, les finlandais, terreurs sur la distance et voulant succéder à Nurmi. Et puis il y a quatre françàis dont le numéro 71 El Ouafi Boughéra, le petit algérien mécano. Il est loin d’être le favori.
Nous sommes plongés dans leur course, haletante, difficile, à contre vent.
Pas besoin de texte, juste un dessin répétitif qui dit la longueur et la souffrance d’un marathon. Les visages se crispent, les pieds saignent. Et puis dans cette souffrance apparait El Ouafi qui va devenir champion olympique.
Cet exploit n’empechera pas une vie chaotique à El Ouafi.Il mourra dans des conditions non élucidées en 1959.
Marathon est une saga qui rend hommage à un homme peu connu, au sport . le tout avec un auteur qui devient tour à tour conteur, journaliste, chroniqueur et enfin dessinateur.

Nicolas Debon nait en 1968 en Lorraine. Après des études à l’École nationale supérieure d’art de Nancy, il déménage à Toronto en 1993 où il devient citoyen canadien . Il réside une dizaine d’années au Canada, et sera notamment dessinateur de vitraux, avant de suivre des cours du soir qui vont lui faire découvrir l’univers de l’illustration jeunesse. Ses premiers ouvrages sont publiés en Amérique du Nord, où ils ont été notamment finalistes des prix littéraires du Gouverneur général du Canada. Son premier travail pour l’édition française est paru en 2004.