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Bienvenue parmi nous d’Eric Holder. Flammarion💛💛💛

Bienvenue parmi nous par Holder

Pour ces jours d’été suspendus entre chaleur et langueur pourquoi pas un roman d’Eric Holder.
Autant repartir un peu loin dans sa bibliographie , en 1998 avec Bienvenue parmi nous.
Roman minimaliste à tous les étages : livre de 150 pages , écriture ciselée d’Eric Holder , peu de mots pour décrire mais des mots justes qui parlent des ressentis , du cœur de soi , des paysages.
En 150 pages Eric Holder nous trace un road trip émouvant.
Taillandier est un peintre reconnu qui ne produit plus rien depuis 7 ans.
Il vit dans une aisance matérielle , auprès de sa femme Alice pour laquelle son sentiment amoureux est vivace.
Mais à 62 ans , Taillandier est bougon , ronchon et en a marre de la vie.
La seule solution pour lui est de disparaître. Il organise un dernier repas d’anniversaire avec femme et enfants et décide de partir par la route vers les Ardennes.
C’est sans compter Daniella , jeune fille perdue et larguée qui apparaît dans sa vie par l’intermédiaire de sa femme Alice.
Le road trip vers les Ardennes va prendre la forme d’une autre aventure : un périple avec Daniella entre Bretagne et côte Atlantique.
Périple durant lequel Taillandier va se révélait à lui-même.
Tout cela est écrit avec finesse , élégance et profondeur. Pas de mièvrerie dans la rencontre entre Taillandier et Daniella.
150 pages ciselées pour nous dire la difficulté de vivre d’un sexagénaire ou d’une adolescente .
Cette difficulté qui est inhérente à tous et à chacun et dont le titre du roman Bienvenue parmi nous est tellement juste

Des femmes en noir d’Anne Isabelle Lacassagne. Editions du Rouerge 💛💛💛

 

Des femmes en noir par Lacassagne

Des femmes en noir est le premier roman d’Anne Isabelle Lacassagne. D’habitude elle écrit des livres pour la jeunesse.
Cette fois-ci , elle s’est inspirée de son milieu professionnel. Travaillant dans un service diocésain , son premier roman a trait à l’Eglise et plus particulièrement a un prêtre dans  une paroisse .
L’idée de départ est simple est en même temps incongrue . Un prêtre , la soixantaine , dénommé André Foucher vient de décéder. Et là stupeur,on s’aperçoit que le prêtre est une femme.
L’Eglise, le diocèse doivent faire face à cette nouvelle.
Pour cela , une enquête est ouverte afin de pouvoir connaitre la vie antérieure du prêtre André Foucher et pour savoir de quelle façon il a pu cacher cela à ses paroissiens et à la hiérarchie de l’Eglise
Les deux personnes nommées pour enquêter sont un jeune prêtre , Bernard-Marie et une laïque , Charlotte , chancelière du diocèse.
Par l’intermédiaire de ces deux personnages nous allons entrer dans le quotidien de la vie du prêtre et d’une paroisse. C’est restitué au plus prés et de façon tout à fait réaliste.
Cette enquête va surtout emmener Bernard- Marie et Charlotte dans la vie antérieure d’André Foucher , dans laquelle se trouve la réponse au fait de ce » prêtre féminin ».Ce livre est aussi et surtout une réflexion sur la place de la femme d’en l’Eglise.
Malheureusement je trouve que livre n’approfondit pas la réflexion sur ce sujet , ni sur le positionnement doctrinal et théologique de l ‘Eglise.
Peut être la faiblesse d’un premier roman , tout comme les situations opportunistes et faciles .( une semaine de vacances chez l’ancienne responsable d’une maison d’accueil – ou tous ces nonagénaires qui ont une mémoire extraordinaire sur des événements vieux de 40 à 50 ans)
La lecture reste agréable et linéaire mais nous sommes dans un entre deux.

Les deux messieurs de Bruxelles d’Eric-Emmanuel Schmitt. Albin Michel 💛💛💛

Les deux messieurs de Bruxelles par Schmitt

Voici un recueil de 5 nouvelles rassemblées sous le titre de Les deux messieurs de Bruxelles. A la suite de ces cinq nouvelles, Eric-Emmanuel Schmitt a eu la judicieuse idée d’intégrer son journal d’écriture. Cela nous permet de comprendre le cheminement de l’écrivain et de s’apercevoir que ces 5 nouvelles sont tenus par un fil invisible qui est l’ amour.
La trame de ces nouvelles comme l’écrit Eric-Emmanuel Schmitt est la persistance des amours invisibles et des vies virtuelles qui composent le fond d’une vie réelle.
Cette trame se retrouvera pour nous parler d’un amour homosexuel, de l’amour pour un chien , de l’amour porté au travers de maladies.
Comme toujours avec Eric-Emmanuel Schmitt, c’est écrit avec délicatesse , élégance , ce qui n’empêche pas la violence des situations.
Sous son aspect enlevé et délicat pointe une réflexion profonde sur le couple , la fidélité , les amours interdites et nos actions en tant qu’homme ou femme .
L’amour porté à un chien peut paraître déplacé alors que cet amour est un pardon porté aux hommes.
Dans plusieurs de ces nouvelles il est question de ces vies virtuelles , de ces vies que l’on a pas amené au réel. La réflexion se fait plus profonde , humaine et émotionnelle et comme le dit Eric- Emmanuel Schmitt dans son journal d’écriture : « Qu’est ce qu’une vie qui vaut la peine d’être vécue ? A cette question, il y a autant de réponses que d’individu sur terre. Je n’admettrai jamais que quelqu’un en décide pour moi ou pour les autres  »
En synthèse ces cinq nouvelles sous couvert d’amours invisibles , nous emmène sur les chemins de la tolérance , de l’ouverture . Vaste et beau programme.

Tiens Ferme ta couronne de Yannick Haenel. Gallimard 💛

Tiens ferme ta couronne par Haenel

Je viens de terminer la lecture de Tiens ferme ta couronne de Yannick Haenel. Et bien je pense que ma critique sera aussi foutraque et déjanté que ce livre.
A la fin de la lecture de Tiens ferme ta couronne , je suis circonspect,interrogatif par rapport à cette lecture. Il m’a fallu de la persistance pour aller au bout des 330 pages de ce livre. Pendant toute la lecture, je suis resté sur le chemin à côté du narrateur. A aucun moment je n’ai pu ressentir une émotion ou tout au moins la possibilité de me raccrocher à son histoire.
Peut être est ce dû au fait que c’était le premier livre de Yannick Haenelque je lisais.
Suite à cette lecture , j’ai lu des interviews , j’ai regardé des émissions Tv où était présent Yannick Haenel. J’ai lu des critiques du livre dans des journaux spécialisés. J’ai lu aussi des critiques des membres de Babélio.
Autant les critiques des journaux spécialisés sont largement positives , autant les critiques dans Babélio sont franchement partagées.
Pourtant ce livre était dans la dernière ligne droite du Goncourt et il a obtenu le prix Médicis.
Il doit bien y avoir quelque chose.
Malheureusement avec moi , il n’a pas trouvé son lecteur.
d’abord il aurait peut être fallu que je connaisse l’oeuvre de Yannick Haenel, sachant que son narrateur est un personnage récurrent.
Dans Tiens ferme ta couronne il s’appelle Jean ( une seule mention dans tous le livre ). C’est par la lecture des articles de presse que ce Jean avait un nom depuis 2007 : Jean Deichel. Deichel comme dèche – déchu- déchet.
Jean est un loser qui vit dans un 20m2 dans le 20ème à Paris. Il est écrivain de son état et a une obsession : faire lire accepter son scénario de 800 pages qui parle de Melville le créateur de Moby Dick.
Il va être mis en relation avec Michael Cimino , grand cinéaste américain auteur de 2 chefs d’oeuvre : Voyage au bout de l’Enfer et La porte du Paradis.
Voila le point de départ de la quête ou du road movie de Jean le narrateur.
A partir delà et de façon aléatoire il va croiser effectivement Michael Cimino mais aussi Isabelle Huppert ou encore un chef de rang très macronien. Il va déambuler dans Paris avec un dalmatien du nom de Sabbat. Ce dalmatien appartenant à un joueur de poker du nom de Tot. Il va aussi rencontrer une jeune femme Lena qui est conversatrice du Musée de la Chasse.
Entre obsession et addiction notre notre narrateur adore la vodka, les alcools à haute dose.
Il a aussi une addiction pour le film de Coppola : Apocalypse Now. le Dvd de ce film tournant en continu dans son petit appartement.
Ce road movie très cinématographique va tourner autour des 2 films importants de Michael Cimino et de celui de Coppola.
Pour Yannick Haenel c’est la quête de la vérité et du point indemne que l’on a près du coeur.
Seul un loser , vivant hors du monde sociétal est à même de traquer et de trouver cette vérité.
Cette vérité que l’on trouve dans le cerveau mystiquement alvéolé de Melville et sûrement dans celui de Cimino ou Coppola.
et puis dans ce roman foutraque il y a Proust dont le titre du roman est emprunté à l’un de ces livres , il y a le tableau du Cavalier de Rembrandt à la collection Frick à New york , il y a le retable d’Issenheim à Colmar devant lequel se déroule des obsèques irréelles.
Et puis il y a le cerf , celui que l’on trouve dans le film « Voyage au bout de l’Enfer ». D’ailleurs le titre du Film en anglais est The Deer ‘s Hunter – la chasse au cerf.
Ce cerf qui sera épargné à un moment du film et qui lui aussi Tiens ferme sa couronne ( ses bois)
Voilà , je suis resté au bord de ce livre , trop plein , trop vide.
La pensée de Yannick Haenel doit être elle aussi mystiquement alvéolé.
A premère vue , je n’ai pas su entrer dans les alvéoles et dans ce cas là il est de bon ton de dire : Tiens ferme le livre !

De chair et d’os de Dolores Redondo .Mercure noir 💛💛💛

De chair et d'os par Redondo

De chair et d’os est le deuxième volet d’un triptyque se passant dans la vallée de Baztan dans le Pays basque espagnol , en Navarre aux confins de la France.
Cette vallée de Baztan est le pretexte à 3 histoires policières .
De chair et d’os reprend les personnages du 1er tome le gardien invisible.
Amaia Salazar inspectrice à la police Forale de Navarre et en poste à Pampelune se voir chargée d’enquêter sur d’atroce crimes sexuels . Les victimes sont toutes des femmes. Les assassins sont des hommes qui se suicident suite à leurs actes et qui inscrivent invariablement le nom d’une figure mythologique du Pays Basque pour revendiquer leur acte.
En même temps dans les villages de la vallée de Baztan se déroulent des faits proches de la sorcellerie et des traditions enfouies au coeur de chaque famille de cette vallée
Bien évidemment ces deux situations vont se télescoper et vont entrainer Amaia Salazar dans une enquête où sa famille sera malmenée.
Le plaisir de lecture de ce livre est évident car nous sommes plongés au milieu des mythologies basques et dans la beauté naturelle de ces vallées basques.
Le suspens est bien tenu. Assez de fausses pistes ou de pistes justes énoncées en vu du troisième tome sûrement.
Juste ce qu’il faut d’ésotérisme et de surnaturel pour nous faire comprendre cette mythologie basque
Et puis ce livre est aussi le livre d’une famille au travers de plusieurs générations . Une famille vu au travers de ces femmes
C’est un regard original et juste pour nous dire les traditions.
Au delà de ce livre , il faut se rappeler qu’au bout de cette vallée à deux pas de la France il existe le village de Zugaramurdi qui ,il y a deux siècles était partie prenante de cette vallée de Baztan.
Ce village est connu pour ces sorcières qui au 17ème siecle se réunissait dans les grottes alentour
C’est aussi le lieu de la plus grande inquisition contre la sorcellerie . Plus de 60 femmes ont été brûlées au bucher . Tout autant sont mortes dans les prisons du royaume.
Un musée à Zugaramurdi relate cet épisode.
Cela donne une résonance à ce livre policier.

 

La nuit de feu d’Eric Emmanuel Schmitt. Albin Michel 💛💛💛

La Nuit de Feu par Schmitt

La nuit de feu est le livre de la révélation pour Eric -Emmanuel Schmitt. Il a mis 30 ans avant de l’écrire et de mettre des mots sur cette nuit dans le désert algérien.
A 28 ans Eric-Emmanuel Schmitt part faire un trek dans le Sud algérien et plus particulièrement à Tamanrasset et vers l’ermitage de Charles de Foucauld.
Durant cette randonnée il était prévu de gravir le mont Tahat , plus haut sommet du Hoggar.
Arrivé au sommet Eric-Emmanuel Schmitt décide de redescendre seul ce sommet et se perd.
Nuit seule dans ce désert du Hoggar et révélation de la nuit de feu.
Eric-Emmanuel Schmitt est confronté à l’infini , l’indicible , à la force.
De sa vie il y aura un avant et un après.
C’est cette césure , ce changement radical que nous raconte l’auteur.
Une nuit mystique , pas religieuse qui a transformé sa vie d’homme , de philosophe et d’écrivain.
Tout cela est écrit avec délicatesse , simplicité et profondeur d’âme.
Un joli et agréable moment de lecture et de réflexion

La belle n’a pas sommeil d’Eric Holder. Editions du Seuil 💛💛💛💛

La belle n'a pas sommeil par Holder

Voici un livre à la douce amertume mais aussi emprunt d’une élégante légèreté.
Si nous étions dans le monde cinématographique nous serions avec Jean Paul Rappeneau : situation insolite , personnages pétillants , moments de vie , joie et difficulté de la vie mais toujours avec justesse , mélancolie et légèreté.
Nous retrouvons tout cela dans La belle n’a pas sommeil d’Eric Holder.
Tout est insolite.
D’abord Antoine , la soixantaine , libraire bouquiniste ayant installé une cabane « librairie » à l’orée des bois aux confins du Médoc.
Il ne cherche pas à vendre des livres mais seulement à les faire vivre . Il a quelques clients qui passent lui en emprunter.
Pour vivre financièrement il pratique dans sa librairie cabane la réfection des livres pour une certaine Madame Wong. Celle ci le paye à coup de lance pierre !
Antoine vit une passion très mesurée avec la femme du boulanger du village.
Car au loin de la librairie cabane il y a un village , un hameau au milieu de ces landes et chablis du Médoc.
Dans ce village va venir s’installer Lorraine , jeune femme de 28 ans , conteuse professionnelle. Elle est venue dans cette terre bordelaise auprès de sa mère malade.
Il y aussi Jonas ,le laissé pour compte . Il y a aussi le garde champêtre et d’autres…
Lorraine est la belle qui n’a pas sommeil . du haut de ces 28 ans , de la beauté de son corps et de la profondeur de ses yeux bleus elle va faire chavirer la vie d’Antoine , mais pas seulement que de lui.
En tant que conteuse , elle hypnotise son public, enfants comme adultes.
C’est ce moment de vie, en quelques saisons , qu’Eric Holder va nous ciseler par une écriture légère et élégante.
Ecriture légère et élégante tant pour nous décrire les personnages et leurs passions , que pour nous décrire les landes,les chablis les arbres et les ciels océaniques.
C’est une écriture transpercée de lumière. Cette lumière qui jaillit de cette librairie cabane aux abords de la forêt.
Et cette lumière , cette élégance sont là pour nous dire un désir , un amour de la vie , des livres, de la littérature.
Une légèreté pour nous dire une relation , une émotion, des tressaillements amoureux entre la belle et Antoine.
Mais cette légèreté n’est pas dupe du temps qui passe et encore moins des désirs voraces de la belle qui n’a pas sommeil.
C’est un livre émouvant , pétillant sur la vie , les émois , les tressaillements de l’âme mais aussi sur la beauté de la nature et des saisons.
Un bien joli livre .

Un orchestre pour sauver le monde, Voyage au coeur du Sistema de Vincent Agrech. Editions Stock 💛💛💛💛

Un orchestre pour sauver le monde par Agrech

En écoutant Brava ou Mezzo j’avais eu l’occasion de connaitre l’Orchestre Bolivar et son chef emblématique Gustavo Dudamel. J’avais étais marqué et impressionné par le dynamisme et la vitalité de cet orchestre et de ces musiciens. de la bonne humeur , une façon originale de sortir des canons de la musique classique et la découverte d’un répertoire sud américain.
Ces différentes écoutes m’avait ouvert aux orchestres de jeunes , au Sistema et au Venezuela.
Et puis le livre de Vincent Agrech Un orchestre pour sauver le mondedans la dernière Masse Critique. Je tope avec d’autres ce livre.
Et le voila quelques jours après dans ma boite aux lettres.
Merci à Babelio et aux Editions Stock pour cette découverte et lecture.
Le livre de Vincent Agrech est exhaustif et nous présente de façon complète cette expérience du Sistema au Venezuela.
Vincent Agrech, journaliste, critique musical et producteur nous retrace la vie de Sistema de sa naissance vers les années 1970 jusqu’à sa mise en sourdine en 2017 du fait des événements politiques au Venezuela.
Sistema est au départ un système d’éducation musicale contre la pauvreté, la délinquance.
Au point de départ il y a José Antonio Abreu , pianiste, éducateur , économiste , député et enfin ministre de la culture.
C’est lui qui est à la fondation et à la direction de Sistema : un réseau national d’orchestre d’enfants.
Pour cela il va créer dans les villes et les campagnes des nucléos, soit des entités où les enfants entourés de professeurs et de musiciens vont apprendre le chant , la musique. et cette apprentissage va se faire en groupe , une vingtaine d’heure par semaine. c’est en cela que tient une partie de l’originalité de Sistema : l’apprentissage en groupe et non comme en Europe de façon individuelle.
Cette éducation musicale à partir des nucléos va perdurer pendant 40 ans et se développer . Au début les instruments étaient importées de l’Union Soviètique et des Pays de l’Est.
mais l’évolution de Sistema va faire naitre des nouveaux métiers autour de la lutherie.
Les premiers éléves de Sistema deviendront des éducateurs et des frormateurs pour les nouveaux arrivants dans Sistema.
Certains de ces élèves deviendront des musiciens professionnels et permettront la naissance de l’Orchestre Simon Bolivar , tête de proue de Sistema.
Parmi ces élèves figurait Gustavo Dudamel. Il a suivi le cursus depuis le nucléo, l’apprentissage du violon et enfin la direction d’Orchestre.
Tout cela ne fut possible que grâce à José Antonio Abreu qui mis sa culture au service d’un engagement politique et sa conscience jésuitique à la réalisation de Sistema
Le Venezuela comme tous les autres pays d’Amérique du Sud a été fortement colorée par l’Eglise Catholique ( colonisation ) et plus particulièrement par le message des Jésuites : A savoir un développement du spirituel , du culturel dans une organisation assez pyramidale.
Dans Sistema , Maestro Abreu a calqué ce message : Développer la jeunesse par la culture musicale dans une organisation sans faille : nucléos , groupes , orchestres , administration
Et la politique ne peut être oubliée dans la réussite et les difficultés actuelles de Sistema.
Le Venezuela reste admirative de Simon Bolivar , l’émancipateur des colonies espagnoles, qui participa de manière décisive à l’indépendance de de nombreux pays sud américains.
Son combat contre la monarchie espagnole a été interprété par Hugo Chavez comme un archétype de la lutte contre toute influence étrangère.
Et actuellement de façon encore plus importance par son successeur Nicolas Mauro.
Le Sistema est donc partie intégrante de la politique vénézuélienne et représente pour le pouvoir une vitrine importante ( surtout l’Orchestre Simon Bolivar).
Le Sistema vit essentiellement sur les subsides de l’Etat.
Etant une vitrine importante , le Sistema est devenu pour le pouvoir un signe de réussite .Et cette réussite a été quantifiée : 1 million d’élèves , 1 300 orchestres et l’Orchestre Simon Bolivar comme étoile.
Cette implication de l’Etat va pouvoir être vécu sans trop de heurts jusqu’à la mort de Chavez.
voila ce qu’en dit Gustavo Dudamel page 51
« Le Sistema est le symbole du pays, admiré et soutenu pars tous. Son financement dépend de l’Etat, il n’y a donc rien d’illogique à ce que le Bolivar, qui en est le fleuron, se produise dans des circonstances officielles……Nous nous sommes fixés l’objectif du million avec l’appui du gouvernement. Cette massification permet de franchir un nouiveau seuil qualitatif. Alors, oui, j’assume pleinement le témoignage de ma reconnaissance. Car ce qui est entrain d’advenir au Venezuela est quelque chose de merveilleux, un exemple pour le monde, comme une explosion de l’art et de la pensée »
Avec l’arrivée au pouvoir de Nicolas Maduro, les choses vont lentement mais radicalement changer.
Au coeur de l’été 2017 Maduro a convoqué l’élection d’une assemblée constituante. Il s’agit en fait d’un coup d’état institutionnel.
Gustavo Dudamel publie alors un communiqué (page 162)
« Ma foi en la justice, et dans le respect de la diversité des opinions, m’oblige, comme citoyen vénézuélien, à dénoncer la décision illégale de la part du gouvernement de faire élire une assemblée constituante qui aurait le pouvoir non seulement de réécrire la constitution mais aussi de dissoudre les institutions nationales »
Suite à ce communiqué Nicolas Maduro annule la tournée aux Etats Unis du nouvel orchestre national juvénile du Venezuela.Puis quelques jours plus tard la tournée asiatique du Bolivar adulte.
Depuis le printemps 2017, Gustavo Dudamel n’a plus dirigé l’orchestre phare de son pays natal, dont il est toujours directeur musical, et n’est pas retourné au Venezuela.
Il vit la moitié de l’année à Los Angeles dont il dirige l’Orchestre Philharmonique , et l’autre moitié de l’année à Madrid, en Espagne, pays dont il a obtenu la double nationalité.
Plus de 30% des membres des orchestres Sistema ont pris le chemin de l’Exil.
Triste réalité mais le livre de Vincent Agrech n’est pas que cela.
Son titre en est le reflet : Un orchestre pour sauver le monde.
Pendant 40 ans Sistema a mis en place une idée originale pour amener collectivement des enfants vers l’Art la pensée et le développement de soi.
Sistema a fait des émules dans de nombreux continents et pays.
C’est de ces expériences que nous parle Vincent Agrech . Que ce soit à Kaboul , en Turquie , dans les camps de migrants en Grèce , mais aussi aux Etats Unis, dans les banlieues parisiennes ou encore à Fukushima au Japon, un formidable réseau d’orchestres d’enfant se met en place ouvrant de nouvelles portes et répondant aux fléaux de l’exclusion du déracinement et de la guerre.
Sistema est en sourdine actuellement au Venezuela , mais grâce à tous ce qui se sont investis depuis 40 ans l’idée de Sistema s’est propagée et vit actuellement au coeur du monde.
Gustavo Dudamel continue son oeuvre avec les jeunes de Los Angeles.
Les musiciens vénézuéliens attendent des jours meilleurs pour poursuivre
Et pour terminer cette critique quelques mots de Vincent Agrech à l’attention de Gustavo Dudamel ( page 304)
« Le Sistema vénézuélien fut une expérience inouie et paradoxale.Sa fin possible confirme ce que nous, Européens, savions déjà : l’art n’a pas le pouvoir de se substituer aux nécessités vitales, la barbarie peut l’étouffer. Il a celui , en revanche de ressusciter, comme toute chose d’essence spirituelle. le Sistema vénézuélien ressuscitera. La flamme est gardée ailleurs, par ceux qui sont partis, ceux qui se sont convertis, et même, tant qu’ils en ont la force, ceux qui sont restés….. le monde a encore beaucoup à apprendre du Sistema….Celui d’une main tendue, à travers la musique, aux enfants les plus pauvres. Celui d’une éducation d’excellence où se rencontrent toutes les classes sociales. ailleurs en Amérique latine, et même sur d’autres continents, certains vont déjà plus loin que l’original, avec moins de zones d’ombre….
Cher Gustavo, la charge qui pèse sur toi est aussi écrasante qu’infini son chagrin.Tu es un emblème, l’incarnation d’un idéal. Tu dois guider à travers la tempête un navire au bord duquel on t,interdit de monter et dont l’équipage est aux fers.
Et si tu parviens à convaincre, il faudra penser un nouveau Sistema pour le Venezuela, continuer à brandir pour le reste du monde un flambeau que personne ne pourra lever aussi haut que toi « 

Exit le fantôme de Philip Roth. Gallimard💛💛💛

Exit le Fantôme par Roth

 

Première expérience de lecture d’un livre de Philip Roth. Suite à son décès j’ai lu et vu un certain nombre d’article présentant son oeuvre ainsi que les grandes obsessions de Philip Roth. J’ai vu tout particulièrement l’ interview qu’avait fait François Busnel dans le cadre de son émission spéciale de la Grande Librairie.
Le personnage anti conventiel ,pour le moins,de Philip Roth m’a interpellé.
J’ai donc fait le saut et par l’intermédiaire de ma médiathèque je me suis procuré Exit le fantôme .
Dans ce livre j’ai retrouvé toutes les grandes obsessions de Philip Roth , la belle New York , et les nettement moins beaux Républicains autour de George Bush entre le 11 Septembre 2001 et l’invasion de l’Irak en 2004 .
Le double de Philip Roth , Nathan Zuckerman, écrivain de son état, vit seul
retiré du monde dans le Massachussetts depuis 10 ans. Durant cette période il a du combattre et vaincre un cancer de la prostate .
C’est pour cette raison qu il revient momentanément sur New York afin de subir une opération qui devrait faire disparaître son incontinence.
Durant ce séjour New Yorkais, Nathan Zuckerman va faire des rencontres inattendues. D’abord une vieille dame Amy Belette, qu’il a connu dans sa jeunesse, Richard Kliman un jeune écrivain arriviste et puis surtout un jeune couple d’écrivains qui veulent échanger leur appartement new yorkais contre une maison perdue loin de tout.
Et Nathan Zuckerman va avoir un ultime coup de foudre pour Jamie la jeune femme du couple
A travers tous ces personnages vont se rencontrer, se percuter toutes les obsessions de Philip Roth:
La peur de vieillir, la virilité ,le désir , la femme, le sexe le besoin de s éloigner de tout et puis la judeite et encore l’Amérique des Républicains
C’est du Philip Roth pur jus. C’est sombre, désenchanté et écrit avec une simplicité qui démontre le talent de l’écriture.
Mais le côté sombre, la vieillesse est un naufrage et je me retire du monde me laisse une impression mitigée.
Ce pessimisme assumé et irradiant les hommes et le monde ne peut être qu’une vision parcellaire.
J’ai du mal à résumer l’homme à ce qu’il a entre les jambes ! Que ce soit son identité, oui ; que cela mène sa vie et le monde:non.

Le Goût du large de Nicolas Delesalle. Livre de poche 💛💛💛💛

Le goût du large par Delesalle

Dans de nombreuses critiques faites sur Babelio pour le goût du large de Nicolas Delesalle, revient la notion de récit de voyage. Je ne trouve pas que le livre soit un récit de voyage.
Sylvain Tesson quand il se pose en Sibérie , quand il revient de Moscou en moto ou encore quand il traverse les chemins noirs de la France nous fait un récit de voyage.
Nicolas Delesalle lui nous donne des fragments , des souvenirs de sa vie journalistique , des instants de ces reportages.
Si il y a un récit de voyage c’est un récit interne.
Et quoi de mieux qu’un porte container pour nous parler de lui.
Le porte container symbole de notre armoire à souvenir et émotion.
Tous ces containers colorés anonymes, juste marqués par une référence chiffrée qui vont d’un océan à l’autre avant d’être débarqués.
Ce long porte container , ces différents ponts , son équipage Multi-ethnique voguant au gré des océans. Un environnement spartiate , pas très stable.
C’est sur l’un de ces porte containers , le MSC Cordoba que Nicolas Delesalle va embarquer à Anvers pour atteindre Istanbul 9 jours plus tard.
Pendant 9 jours il va découvrir le goût du large. Mais pas le goût du largevécu lors d’une croisière avec cocktails , soirées dansantes et excursions dans des lieux paradisiaques.
Non il va découvrir le goût du large quotidien d’une dizaine de marins ayant laissés familles et proches pour travailler sur un porte container dont ils ne connaissent pas le chargement, mais dont ce chargement représente le monde économique actuel.
Le goût du large lors d’une croisière vous éloigne du monde ,dans une bulle de frivolité et de luxe surfait.
Le goût du large dans un porte container vous raccroche au monde.
Alors que l’on pourrait croire que ce voyage dans les flancs de ce bateau de fer et de rouille soit un enfermement , un moment hors du monde , et bien c’est tout le contraire.
Nicolas Delesalle est présent au monde et la pérégrination du MSC Cordoba est pour lui le moyen d’ouvrir ses containers d’émotion et de souvenirs.
Et l’ouverture de ces containers nous offre une écriture simple , émue , humoristique . Une écriture qui nous fait humer les embruns de l’Océan ,mais aussi les effluves de l’Afrique , de l’Asie ou encore l’humidité prégnante d’un coin du Causse Noir vers Millau.
Cette écriture nous fait entendre les cris , les détresses, les espoirs de ces pays , de ces peuples bordant la Méditerranée.
Comment ne pas être profondément touché par ce passage du porte container entre Tunisie et Sicile , « surfant sur une mer de cadavres  » alors qu’aujourd’hui l’Aquarius a toute les peines du monde pour trouver un port accueillant aux migrants.
Par tous les souvenirs de ces reportages , Nicolas Delesalle nous instille la réalité de notre monde contemporain.
Ce monde que nous ne souhaitons pas toujours voir . Un container anonyme , coloré, mais bien fermé dont nous voulons ignorer le contenu.
Le goût du large est un beau roman de vie.