Qu’est ce qu’un phalanstère ? un phalanstère est un regroupement organique des éléments considérés nécessaires à la vie harmonieuse d’une communauté appelée phalange. le concept fut élaboré par Charles Fourier au 19ème siècle. Pour quelle raison commencer ce billet par cette définition ? Tout simplement car l’autrice parle de phalanstère pour ce rappeler que ces grands parents et d’autres personnes vivaient dans le même immeuble et avait inventé une vie en communauté. Phalanstère plutôt que vie en communauté ? le choix des mots a son importance pour Agnès Desarthe. Cette importance des mots est parfois envahissante et enferme l’émotion. Emotion au sein de ce livre dans lequel l’autrice télescope le présent, le passé et l’avenir autour de la notion du vieillissement, de la mémoire, de la vie. Le Château des Rentiers est un livre déstructuré ou les souvenirs , les âges se mélangent avec humour et assez de légèreté. Par des chapitres très courts Agnès Desarthe va aborder une multitude de thèmes. Parfois avec bonheur, plus souvent dans la complexité peu comprise. Je reste donc sur une impression dubitative malgré une écriture ciselée et des questionnements existentiels. « Quand on est vivant, c’est pour la première et la dernière fois. Je ne cesse de m’en étonner, de trouver cela effrayant et merveilleux « .
Agnès Desarthe, née Agnès Naouri le 3 mai 1966 à Paris, est une écrivainefrançaise, auteure de livres pour adultes et pour enfants, et traductrice. Elle est l’auteure de deux pièces de théâtre7 (Les Chevaliers, mise en scène par Gilles Cohen au théâtre du Rond-Point en 2005 et Le Kit, qui n’a pas été encore montée) ainsi que de plusieurs chansons.
Des aquarelles aux teintes douces que relèvent des couleurs jaunes, ocres et des bleus profonds ombrés . Tel est l atmosphère du dernier roman graphique d’Etienne Davodeau. Ces couleurs pour nous dire un fleuve dont le nom n’est jamais prononcé durant toute la BD. Il est juste nommé dans le titre du roman graphique : Loire sans l’article . Car le fleuve est le personnage central avec une femme Agathe. Néanmoins Etienne Davodeau maintien une ambiguïté dès les première s planches de son album :l Deux planches qui représentent le fleuve un pont et un personnage ayant la soixantaine Louis. Et Louis de dire : « En fait , tu sais, l’idée de la revoir me plaisait bien « . De qui parle Louis : du fleuve ou d’Agathe ? Louis revient au bord du fleuve suite à un mail reçu de la part d’Agathe. Elle l’attend dans sa maison ligérienne. Quand Louis arrive au bord du fleuve Agathe n’est pas au rendez vous. Les personnes présentent sont les hommes et les femmes de sa vie. Il y a donc le fleuve, des hommes et des femmes. La vie qui passe. La vie qui s’en va. le courant du fleuve. Etienne Davodeau a le don à travers ces aquarelles de nous transmettre , le temps qui passe. Des planches en 16/9 sans texte pour nous dire le silence, la méditation et le calme. Il nous laisse le temps de ressentir les mystères du lieu. Associé au fleuve et à la nature , ce groupe d’hommes et de femmes vit lentement autour d’Agathe. le fleuve ou Agathe : Que veulent -ils revoir ? C’est un roman graphique à déguster lentement , se laisser prendre par la majesté des lieux et par les aquarelles d’Etienne Davodeau. Loire est un roman graphique ou le texte s’estompe derrière le rythme du fleuve. « Est ce qu’un fleuve en nous parlant de lui peut nous parler de nous ? ( Page 78 ) Pour complétez cette lecture sur le fleuve je vous conseille le livre de Guillaume Nail : On ne se baigne pas dans la Loire .
Étienne Davodeau, né le 19 octobre 1965 à Botz-en-Mauges (Maine-et-Loire), est un dessinateur et scénariste français de bandes dessinées. Avec près de 45 albums publiés en 30 ans (en janvier 2023), l’auteur-dessinateur s’est imposé comme une grande figure de la bande dessinée documentaire1.
J’étais resté sur la lecture de Une joie si féroce et celle-ci ne m’avait pas emportée. Un petit cru dans la biobibliographie de Sorj Chalandon. Rien de grave. Je reviendrais aux livres de Sorj Chalandon. Et j’y suis revenu avec L Enragé. Tout est là. J’ai retrouvé l’auteur de le Jour d’avant, Les promesses, le Quatrième mur et Profession du père. L’humanité, la colère, la violence, la solidarité, l’émotion, la fraternité irriguent le dernier roman de Sorj Chalandon. l’enragé tire le fil tenu de Profession du père : L’enfance maltraitée, violentée. Sorj Chalandon s’appuie sur des faits réels : le 27 août 1934 cinquante-six enfants de révoltent et s’échappent de la colonie pénitentiaire pour mineurs de Belle-Île-en-Mer. La chasse aux enfants est ouvertes. Ils seront tous capturés. Pour son roman Sorj Chalandon décide que l’un d’entre eux , Jules Bonneau, la vingtaine, réussit son évasion. Jules Bonneau est à la colonie pénitentiaire depuis sept ans. Abandonné par sa mère , violenté par son père, rejeté par ses grands parents, il finira par un être un adolescent vivant de ses larcins. Cela ne durera qu’un temps et son destin le mènera à la colonie de Belle-Île-en-Mer. Jules Bonneau deviendra La Teigne. « Je n’ai pas le droit aux sentiments. Les sentiments c’est un océan, tu t’y noies. Pour survivre ici, il faut être en granit. Pas une plainte, pas une larme, pas un cri et aucun regret. Même lorsque tu as peur, même lorsque tu as faim, même lorsque tu as froid, même au seuil de la nuit cellulaire, lorsque la l’obscurité dessine le souvenir de ta mère dans un recoin. Rester droit, sec, nuque raide. N’avoir que des poings au bout de tes bras « Comment pourrait-il en être autrement. Les mots de brimades, de vexation, de violence sont insuffisants. Cette colonie pénitentiaire est un déni d’humanité, d’enfance. L’enfant n’a en fait aucune existence. Il est une chose à redresser coûte que coûte. L’écriture violente et rageuse de Sorj Chalandon ne nous épargne rien et nous met face à cette horreur. La première partie du roman nous détaille cette barbarie. Pour certains cette partie a pu paraître longue et un peu voyeuriste. Je ne le pense pas. cette partie du roman représente sept années de la vie de Jules et une grosse centaine de pages permet de mettre de la durée alors que les sept ans vont tout de même être traités comme une ellipse. Face à cette enfance meurtrie, l’auteur nous livre une deuxième partie du roman plus fraternelle. Il existe sur Belle-Île-en-Mer des personnes qui sont prêtes à aider Jules. Néanmoins nous sommes en 1934 et le monde de l’entre guerre est en ébullition. Les croix de Feu, le fascisme, la montée d’Hitler, la guerre d’Espagne ont une répercussion sur le monde de Belle-Île-en-Mer. Et dans ce monde en ébullition , Jules, enfant meurtri , va devoir se coltiner à l’âme humaine belle ou mauvaise. Il rencontrera un poète au prénom de Jacques, qui écrira un poème « la chasse à l’enfant « . Il essaiera même dans faire un film. Ce poème a été appris dans les écoles. Il paraissait anodin. Pourtant il parlait de l’enfance meurtrie et niée. Les enfants de Belle-Île-en-Mer ne sont pas des criminels. Juste des enfants qui ont volé des oeufs, du pain, qui sont orphelins ou qui ont été rejeté par leurs parents. Des enfants que l’on veut rendre invisibles. Ce livre leur apporte respect et dignité. Belle-Île-en-Mer n’est pas qu’une magnifique île propice à la randonnée et aux vacances. « Une larme idiote brûlait ma paupière. »
De 2008 à 2012, Sorj Chalandon est le parrain17 du Festival du Premier roman de Laval, organisé par Lecture en tête. Depuis 2013, il est le président du jury18 du Prix Littéraire du Deuxième Roman.
Il n’est pas simple de raconter 4 000 ans de l’histoire d’une ville telle que Jérusalem. C’est le projet auquel se sont attelés Christophe Gaultier pour les illustrations et Vincent Lemire pour le scénario et le texte. Christophe Gaultier est un auteur de bandes dessinés. Il travaille également à l’illustration jeunesse. Vincent Lemire et un historien qui a vécu à Jérusalem et qui a écrit un certain nombre de livres sur cette ville. Histoire de Jérusalem est un projet délicat car Jérusalem reste lié au conflit israélo-palestinien. Avec rigueur et pédagogie Christophe Gaultier et Vincent Lemire ont relevé le défi. Celui qui nous présente la ville est un vieil olivier de plus de 4 000 ans. De sa position excentré du Jardin des Oliviers, il a perçu, vu, ressenti les différentes vies de Jérusalem car Jérusalem a vécu, est morte et a renait.
Cette fresque historique nous permet de mieux comprendre ce creuset politique et religieux. Le partage, les accommodements ont souvent été présents au profit du développement de Jérusalem. Les auteurs nous facilitent la compréhension en s’attachant aux lieux et bâtiments connus de tous : Le Saint Sépulcre, la Mosquée Al Aqsa, Le Dôme du Rocher. Parsemé de cartes, le propos est clair et accorde au représentation des trois religions monothéistes une importance juste. Tout s’emmêle et s’entremêle à Jérusalem jusqu’à vouloir faire de cette ville la capitale d’Israël, objet de toutes les convoitises. Gardons avec nous la sagesse de l’olivier : « A quoi ressemblera ma chère Jérusalem dans 50 ans, dans 500 ans ? J’ai assez de recul pour n’avoir aucune certitude « .
Le Voyage du Salem. Pascal Janovjak . Actes Sud. Janvier 2024.
201 pages
ISBN : 978-2-330-18615-9
Le voyage du Salem porte bien son titre. C’est à un voyage que nous convie Pascal Janovjak. Oh pas un voyage comme on l’entend d’habitude. Cela ne ressemble pas à des vacances , les cocotiers ne sont pas là et cela ne sent pas le sable chaud comme l’a dit Gainsbourg. Pourtant le côté légionnaire n’est pas très loin. Ecoutez cela : Au début des années 1980 le Salem est un cargo portant haut ses 200 000 tonnes à la jauge Avant de s’appeler Salem il s’est appelé Sea Sovereign dans les années 1970 et était la fierté de la flotte commerciale suédoise. Mais les années 1980 sont aussi l’époque des bateaux poubelles et des pavillons de complaisance. Ce fut le sort du Sea Sovereign. Il devint le Salem, pavillon du Libéria, armateur grec, financier américain et équipage tunisien. En cette fin de 1979, il est à quai au Koweit et on le remplit de 200 000 tonnes de pétrole brut, direction Gênes. On le retrouvera entrain de couler le 19 janvier 1980 au large des côtes du Sénégal. L’équipage a eu le temps de monter à bord des canots de sauvetage. le Salem s’enfoncera dans le fond de l’Océan sans provoquer de marée noire. Mystère. C’est dans ce voyage de quelques semaines qui nous entraîne Pascal Janovjak. Voyage au long cours avec des éclairages différents . L’éclairage de l’enquête mise en place par les assureurs et la police maritime. L’éclairage romanesque d’un membre d’équipage tunisien. Enfin l’éclairage de l’auteur lui -même au prise avec se roman et le confinement qu’il vit entre suisse et Italie. La réussite du livre tient à ce mélange entre véridique et vraisemblable. le roman donne la part belle à la force du récit et ce voyage maritime confère à la nostalgie et la mélancolie. Reste une atmosphère telles les brumes et les brouillards océaniques. Au raz des vagues le voyage du Salem s’estompe , l’équipage sur des canots de sauvetage nous rappelle que des esquifs traversent la Méditerranée….
Quatrième de couverture : Je voudrais que ce livre soit l’échiquier de ma mémoire. Le livre : 64 chapitres comme les 64 cases de l’échiquier. Sur l’échiquier un pion atypique : le cavalier. Celui ne se déplace pas en ligne droite. Il navigue sur l’échiquier et ne repasse jamais sur la même case. Il visite donc les 64 cases de l’échiquier. La case 1 ou premier chapitre de Jean Philippe Toussaint est très court , une phrase : « j’attendais la vieillesse, j’ai eu le confinement « Nous sommes en 2020 à Bruxelles au début du printemps, le premier confinement a été mis en place depuis peu. Jean Philippe Toussaint va profiter de cette période pour mettre en place une triple activité : la traduction de la nouvelle de Stefan Zweig « l’échiquier« , l’écriture d’un essai sur la traduction et enfin la mise en place d’un texte en 64 chapitres. Rapidement il ne restera qu’une double activité. Jean Philippe Toussaint laissant tomber l’essai sur la traduction. Ce livre tient du journal et de l’autobiographie. Tout cela donne un livre fin et intelligent qui nous parle de littérature, de création et surtout des échecs. L’émotion vient nous cueillir à la fin du livre, une sorte d’échec et mat.
Jean-Philippe Toussaint, né le 29 novembre 1957 à Bruxelles, est un écrivain et réalisateurbelge de langue française. Fils d’Yvon Toussaint, journaliste au Soir, et de Monique Toussaint, fondatrice de la librairie Chapitre XII à Bruxelles, et frère de la productrice de cinéma Anne-Dominique Toussaint, Jean-Philippe Toussaint est diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris (1978) et titulaire d’un DEA d’histoire contemporaine. Dans sa jeunesse, il a été champion du monde junior de scrabble1. Jean-Philippe Toussaint est l’auteur de romans qui se caractérisent par un style et un récit minimalistes, dans lesquels les personnages et les choses n’ont d’autre signification qu’eux-mêmes
Goldman d’Ivan Jablonka n’est pas une autobiographie de Jean Jacques Goldman puisque l’auteur n’a pu rencontrer celui-ci et n’a pas non plus s’appuyer sur les archives personnelles du chanteur. Ivan Jablonka s’est donc appuyé sur des milliers d’interviews, des extraits de journaux et sur ses souvenirs de » fan » de Jean Jacques Goldman pour écrire une biographie sociologique, historique légèrement hagiographique La lecture du livre est facile et nous replonge dans les années 1980 à 2000 à coups de succès, de Top 50 . Ivan Jablonka fait une lecture sociologique de la carrière de Jean Jacques Goldman. Tour à tour le communisme, le prolétariat, la nouvelle gauche croisent la route de notre chanteur » personnalité préférée des français » Jablonka insiste aussi avec raison sur la judéité de la famille Goldman. Thème de judéité que l’on retrouvera souvent dans ces chansons : la minorité, l’exil, le voyage , la shoah. Jablonka s’interroge aussi en historien sociologue sur cette disparition des radars depuis les années 2000. Reste que le côté hagiographique tempère la réflexion menée. Jean Jacques Goldman ressemble à la statue d’un commandeur indéboulonnable. Tout dans la vie de Jean Jacques Goldman mérite satisfécit. On peut lire sa carrière dans ce sens entre succès singulier et collectif, la création des Enfoirés et des Restos du coeur avec Coluche. On peut aussi se rappeler qu’il fut un chanteur de variétés avec midinettes et une musique rock très standardisée. Que restera de cette lecture : un peu de nostalgie, un rappel des années 80/90. Mais sûrement rien de plus. Le livre s’estompera comme s’est estompé Jean Jacques Goldman.
Né à Paris d’un père ingénieur physicien et d’une mère professeur de lettres, petit-fils de Juifs polonais communistes morts à Auschwitz3, Ivan Jablonka fait ses études secondaires au lycée Buffon. Après des études en khâgne au lycée Henri-IV, il intègre l’École normale supérieure (promotion B/L 1994) et est reçu à l’agrégation d’histoire4.