Archives pour la catégorie Roman

Et brûlent les enfances de Virginie Noar. Les Pérégrines. 🟩🟩🟩🟩🟩

Et brûlent les enfances

Virginie Noar

Les Pérégrines

ISBN : 979 – 1 – 02520 – 673 – 7 Août 2025

222 pages

Et brûlent les enfances de Virginie Noar est un coup de poing, un coup de coeur. Et brûlent les enfances, raconte la réalité d’une famille rattrapée par des renoncements, des cruautés. Et Virginie Noar nous délivre cela à hauteur d’enfant.

Alice, enfant de huit ans à l’époque, nous rapporte un récit à la mémoire incomplète. Alice est la narratrice principale. Il existe un autre narrateur. Celui-ci est un regard, un oeil, une photographie.

Ce regard, cet oeil vont régulièrement planter le décor : une chambre, un bureau, les détails d’une cuisine et puis une carte postale de la tour Eiffel.

Dans cette chambre Alice y cache ses silences. Dans un coin de la chambre, son petit frère dort. Alica a deux petits frères, Baptiste et Samy. Dans cet appartement populaire, il y a aussi Annick, la maman. Celle-ci a quitté son mari, et est partie avec ses trois enfants pour cet appartement populaire.

Un jour, Annick présente à ses enfants Adama. Alice et ses frères l’accueillent avec joie et espoir. Et puis arrive la naissance de Marie et Alice, qui nous dit : « Avant Marie, la vie ressemblait à une errance infinie sur terrain vague, grands espaces et pâle caillasse. Certain de trouver quelque chose de valable au bout du chemin rocailleux, je ne rêvais qu’à cette petite soeur qui viendrait un jour ou l’autre embellir les ennuis. Au fond, il s’agissait sûrement du désir de conserver l’enfance, paradis perdu et tout le tintouin, acte désespéré contre le temps déployant à toute vitesse ses emmerdes et ses rides. »

Le bonheur ne durera pas. Chacun va devoir composer avec un délitement familial. Alice, en grande soeur, va protéger au mieux ses frères et sa jeune soeur de cette vie devenue précaire.

Virginie Noar nous transporte et nous émeut auprès de cette famille cabossée, où l’amour reste présent. Les failles, les secrets, les difficultés se retrouvent dans les gestes anodins du quotidien et dans l’exigüité d’un appartement.

Virginie Noar nous touche par la finesse psychologique des personnages, par la justesse des situations et le regard que porte Alice sur le monde qui l’entoure.

Son écriture au plus près des personnages est simple, fluide et tellement juste. Elle nous rappelle ce que l’enfance recèle de non-dits et de traumatismes à venir. Un roman brûlant que l’on referme entre tendresse et violence, en gardant en mémoire les (nos) parts d’enfance volées.
Lu dans le cadre du Prix Livre 2025 de la librairie Au bord du jour – Voiron – Isère. Jury.

Virginie Noar, pigiste et travailleuse sociale, a trente-cinq ans. Elle exerce dans un espace de rencontre parents-enfants. Le Corps d’après est son premier roman. Elle réside en Ardèche, à Joyeuse.

Le grand horizon de Lola Nicolle. Phèbus . 🟩🟩🟩◼️◼️

Le grand horizon

Lola Nicolle

Phébus

ISBN : 978 – 2 -7529 -1492 -7 Août 2025

202 pages

Vincent a une vie rangée, un boulet, une femme et un enfant.
Et Vincent va sortir de cette vie rangée en se lançant dans une course d’ultracyclisme : La Transcontinental Race. Une course qui relie deux points de l’Europe; le point le plus à l’est et le point le plus à l’ouest.
Course réelle qui a lieu tout les ans.
Pour son roman Lola Nicolle a choisi l’année 2019 où la Transcontinental Race reliée Bourgas ( Bulgarie à Brest en France.
Le but de cette course: traverser l’Europe en Quinze jours en parfaite autonomie. Juste 6 bornes obligatoires à checker. Pour le reste chacun suit sa route.
Pour Vincent il s’agit de se retrouver et de retrouver sa vie qui a pu lui échapper.
Ce qui a pu lui échapper : une amie d’enfance, un compagnon d’adolescence décédé, un ami cycliste.
Tout ce lit facilement avec un chapitre sur la course et puis un chapitre sur les amis et amies.
Peu d’interaction avec les personnes rencontrées dans les différents pays de ce périple.
De nombreux thèmes sont abordés dont l’écologie mais le tout de façon superficielle. Seule la réalité de le Transcontinental Race est approfondie.

Dans un style différent, hors compétition, le livre d’Emmanuel Ruben Sur la route du Danube explore cette même veine.
Deux copains à vélo remonte le Danube de l’embouchure à la source.
Un bon contre poids au roman le grand horizon.

Lola Nicolle est titulaire d’une licence de lettres modernes à l’Université Paris VII (2010-2013) et d’un master d’édition à Paris XIII (2014-2015).

Éditrice aux éditions de l’Iconoclaste depuis 2016, elle rejoint le groupe Delcourt en 2019 pour développer au printemps 2020 une collection de littérature française.

Elle est l’auteure d’un premier recueil de poésie, « Nous oiseaux de passage » (Blancs volants, 2017), et a participé à l’ouvrage collectif « Les Passagers du RER » publié aux éditions Les Arènes en 2019.

Elle signe son premier roman avec « Après la fête » (2019).

Nancy-Saigon d’Adrien Genoudet. Seuil. 🟩🟩🟩🟩◼️

Nancy – Saigon

Adrien Génoudet

Seuil

ISBN : 978 – 2- 02158 – 506 – 3 Août 2025

304 pages

Nous sommes en Lorraine en 2020. Simone est décédée depuis quelques années. Elle est enterrée dans le caveau familial. Et le caveau ne va plus pouvoir recevoir de nouvelles dépouilles. Il est décidé d’enlever le cercueil et de procéder à une incinération de Simone. C’est sa fille aînée, Edithe, qui en prend la charge.

En ouvrant le cercueil, Edithe s’aperçoit que sa mère a été enterrée dans un vêtement traditionnel vietnamien : un ao-dai. On ne se rappelle que d’une chose : le mari de Simone, Paul, lui avait envoyé cet ao-dai au début de la guerre d’Indochine avant de disparaître.

Le narrateur, neveu d’Edith, va hériter de cet habit et d’une boîte contenant la correspondance entre Simon et Paul. Une boîte sur laquelle il est écrit : Nancy – Saigon.

Cette correspondance va ouvrir une faille dans l’histoire familiale. le neveu reclus dans son studio à Paris lit, commente et recompose des vies. Au fil des lettres, un personnage apparait : François Tilleul, jeune soldat envoyé en Indochine.

Entre Paris, la Lorraine et l’Indochine se dessine une mémoire familiale douloureuse.

Ce n’est pas un roman de guerre, bien que les exactions soient présentes. C’est plutôt un roman familial avec un sentiment de mélancolie, de perte et de fatalité devant les événements.

Le style fluide imprégné des odeurs de la jungle nous dit aussi les secrets, l’indicible. Et pourtant il laisse en suspens une partie de cette histoire comme si l’ao-dai était éternel.
Lu en tant que jury du prix du Livre 2025 de la Librairie au Bord du Jour- Voiron – 38

Adrien Genoudet est docteur en études cinématographiques, en art et en histoire visuelle. Il a soutenu, en 2018, une thèse intitulée « L’effervescence des images. Les Archives de la Planète d’Albert Kahn », sous la direction de Christian Delage. ATER au Collège de France, il est attaché à la chaire du Pr Patrick Boucheron depuis septembre 2016.

Il reçoit, en 2017, le premier prix de la Fondation Hugot du Collège de France pour ses travaux.

Il est titulaire d’un master II Recherche en histoire et anthropologie des sociétés médiévales et modernes à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne obtenu en 2012.

Eclaircie de Carys Davies. La table ronde. 🟩🟩🟩◼️◼️

Eclaircie

Carys Davies

La Table Ronde

Traduction : David Fauquemberg

ISBN : 979 – 1 – 03711 – 469 – 3

192 pages

En 1843 le pasteur John Ferguson est envoyé sur une île septentrionale des Shetland pour
expulser le seul habitant : Ivar. John Ferguson va faire une chute depuis une falaise et va être
recueilli par Ivar.
John Ferguson est sur l’île pour le déplacement forcé d’Ivar. En manque d’argent il a accepté
cette mission car en tant que pasteur, il a fait scission avec l’Eglise presbytérienne afin de
développer la Nouvelle Eglise. À la suite de sa chute de la falaise, il a été recueilli par Ivar. Va
naître en eux une communauté faite de deux langues et d’un troisième personnage : Mary. Mary
est la femme de John Ferguson. Elle est restée en Ecosse. Mais lors de la chute de la falaise Ivar
a récupéré le portrait de Mary dans un cadre en cuir.
John et Ivar vont peu à peu s’apprivoiser autour de la langue norne, ancienne langue des
Shetland. Depuis la mort de sa grand-mère et de sa mère Ivar vit seul avec ses bêtes et son
rouet. Voir un autre humain est un bouleversement, un miroir. Rencontre inattendue de deux
inconnus
J’ai apprécié la lecture de ce roman du fait de sa concision. Concision des mots, des lieux, des
sentiments. L’autrice s’est servie de deux événements réels pour mettre en présence deux
personnages qui vont se découvrir petit à petit. Malgré la diƯérence de la langue, la raison de la
présence de John, chacun va accepter une éclaircie, une brève amélioration, une brève détente.
Des paysages durs et humides, des conditions de vie spartiates ne vont pas empêcher la
rencontre et la compréhension de l’autre. Une véritable éclaircie clôturera ce roman. Tout en
discrétion.

Lu dans le cadre du Prix 2025 de la librairie Au bord du jour à Voiron- 38. (Jury)

Carys Davies est l’auteur de deux recueils de nouvelles, qui lui ont valu d’être récompensée par le Frank O’Connor Award en 2015. Elle vit dans le nord-ouest de l’Angleterre.

L’entroubli de Thibault Daelman. Le tripode. 🟩🟩🟩🟩🟩

L’entroubli

Thibault Daelman

Le Tripode

ISBN : 978 -2- 37055 – 464 – 2 Aôut 2025

296 pages

Dans un quartier populaire de Paris ou de sa très proche banlieue, vit une famille un peu
beaucoup dysfonctionnelle. Une mère dépassée et excessive, un père alcoolique élèvent cinq
garçons. Chez l’un des enfants s’impose la nécessité d’écrire afin de garder en mémoire cette
enfance et de ne pas s’oublier à demi, peu à peu : l’entroubli.
L’histoire est touchante et authentique. L’histoire d’une famille pauvre, populaire et de leur
quotidien.
Rien de larmoyant. La mère porte cette cellule à bout de bras. Chacun est aimé et aime à sa
façon. Et les événements d’une vie de famille : la maladie du père, l’école, la fratrie. Une famille
complexe, dysfonctionnelle dont Thibault Daelman éclabousse de son style, de son écriture. Un
style fluide, lucide et grâcieux. Un grand talent d’écriture, avec une sensibilité à fleur de peau.
Le choix des mots et des associations donne rythme et musicalité au texte. le texte semble
doux alors que ce texte parle de douleurs, de souffrance, de mémoire.
Le roman courre jusqu’à la majorité du narrateur. On n’a commencé le roman à un moment
anodin de la vie de cette famille, on le quitte de façon aussi simple. le temps et la vie qui
coulent.
« Ecrire pour me réunir, me dissoudre, simultanément.« Des mots pour raconter, des mots pour
les ressentis, les émotions, les souffrances et les silences. Des mots pour que l’entroubli
ne s’efface pas.

Livre lu dans le cadre du Prix de la Librairie Au bord du jour à Voiron – 38. ( Jury)

Enseignant à la Sorbonne, Thibault Daelman donne des ateliers d’écriture créative. L’Entroubli est son premier roman, sur lequel il travaille depuis une dizaine d’années.  

Les hommes de Shetland de Malachy Tallack. Buchet Chastel.🟩🟩🟩◼️◼️

Les hommes de Shetland

Malachy Tallack

Buchet-Chastel

Traduction : Anne Pouzargues

ISBN : 978 – 2 – 28303 – 980 – 9 Août 2025

288 pages

Jack est un sexagénaire qui vit dans une des Iles Shetland. Il vit seul dans un cottage bercé par la musique country et l’écriture. On peut dire qu’il est un peu introverti et très sensible.
Le cottage dans lequel il vit est celui de ses parents : Sonny et Kathleen Paton.
L’histoire de ce roman va se dérouler, lentement, au rythme des vies quotidiennes des personnages. En oscillant entre les années de jeunesse de Sonny et Kathleen et celles actuelles de la vie de Jack.
Cette oscillation sera marquée aussi par la présence d’un chaton Loretta ,d’une petite fille en quête d’amitié et de la musique country.
Il ne faut pas rechercher dans ce roman des événements extraordinaires.
C’est une vie tranquille qui se déploie devant nous, simple et attachante.
Les hommes de Shetland est le premier roman de Malachy Tallack écrivain, journaliste et musicien.
Il accompagne son roman d’un bar code renvoyant aux musiques et textes qu’il a écrit pour ce livre. Cela concourt à cette simplicité et lenteur. le côté îlien.
Reste que cette simplicité et celle lenteur peuvent engendrer un ennui. Mais l’ennui n’est il pas aussi synonyme de vie îlienne ?
Reste un livre de rien qui se lit sans déplaisir, à l’ombre de quelques musiques country.

Né en 1980 dans les Shetland, Malachy Tallack est écrivain, journaliste et musicien. Il est l’auteur de plusieurs essais remarqués (« Sixty Degrees North », « The Un-Discovered Islandsc») et d’un premier roman – non traduit – salué par la critique (« The Valley at the Centre of the World »)

La Valse Atlantique

Je valsais sur les vagues

J’étais fou, j’étais brave

Je faisais de mon mieux

Quand j’ai baissé la garde, la mer m’a frappé fort

Et elle m’a emporté comme un morceau de bois

Refrain

Elle te bercera, elle te secouera

Elle essayera de te contrôler

Elle te fera tournoyer et tourbillonner jusqu’à ce qu’un jour

Tu apprennes a rester en mesure avec ce rythme de sel

Cette magnifique valse atlantique

Comme une giroflée flétrie

Aux dernières heures de la nuit

Au bord de cette atlantique ,infinie piste de danse

Trop tard je suis rentré, j’ai commencé à tourner

J’ai été avalé et recraché encore.

Refrain

Passagères de nuit de Yanick Lahens. Sabine Wespieser. 🟩🟩🟩🟩◼️

Passagères de nuit

Yanick Lahens

Sabine Wespieser

ISBN 978 – 2- 84805 – 570 – 1 Août 2025

224 pages

On ne présente plus Yanick Lahens , auteur de 17 romans, prix Femina en 2014. Elle est une femme d’Haïti et de l’esclavagisme.
Son dernier roman Passagères de nuit se classe dans la recherche des origines, de la place de la femme haïtienne et de la mémoire.
Le roman se situe sur deux périodes entre 1750 et 1850. Première partie à Saint Domingue et La Nouvelle Orléans, puis deuxième partie en Haïti.
Née en 1818 à la Nouvelle Orleans, Elisabeth Dubreuil n’a pas reculé quand elle a été victime de deux tentatives de viol par un ami de son père. Sa grand mère, ancienne esclave arrivée d’Haïti avec son maître qui l’a affranchi va lui donner un exemple de résistance silencieuse.
Cette grand mère va faire connaître le vaudou, le mystère des divinités à Elisabeth et l’aider à fuir la Nouvelle Orléans et embarquer pour Port au Prince. On retrouve Élisabeth des années après, mère d’un homme qui traverse la ville en libérateur : le général Leonard Corvaseau.
Ce roman est porté par une écriture magnifique faite de douceur, de poésie mais aussi de cette violence liée à Haïti.
On peut juste peut être regretter un décalage entre les deux parties du livre avec dans la deuxième partie un narrateur se cachant pendant une quarantaine de pages.
Ceci dit le roman reste un roman d’émotion, de liberté , d’émancipation qui nous parle de mémoire, de génération.
Livre lu en tant que jury du Prix de la librairie Au bord du jour à Voiron (38)

Yanick Lahens, née le 22 décembre 1953 à Port-au-Prince en Haïti, est une écrivaine haïtienne, lauréate de l’édition 2014 du prix Femina pour son roman Bain de lune. Elle est titulaire de la chaire « Mondes Francophones » au Collège de France et a prononcé sa leçon inaugurale intitulée « Urgence(s) d’écrire, rêve(s) d’habiter » le 21 mars 2019.

Ce que prend la mer de Manon Fargetton. Editions Héloise d’ormesson. 🟩🟩🟩◼️◼️

Ce que prend la mer

Manon Fargetton

Editions Héloise d’Ormesson

ISBN : 978 – 2 -48781 – 935 – 1 Août 2025

304 pages

Térence , violoncelliste de renom, a fait un AVC dans sa cabane suspendue au dessus de la plage à Saint Malo. Sa fille, Maxine accourt à son chevet avec sa sœur.
C’est l’occasion de redécouvrir cette cabane , ces souvenirs mais aussi ces secrets. Dans un tiroir, Maxine retrouve des polaroids, envoyés régulièrement et qui dessinent une vie secrète en Ecosse il y a de nombreuses années.
Maxine interroge sa mère, sa sœur, l’agent de son père. En vain. Pas d’explications .
Elle décide donc de partir en Ecosse sur les traces d’une partie de la vie de son père. Une recherche du père qui va déboucher sur une autre recherche autour de la parentalité.
Maxine produit des documentaires sur le web et celui qu’elle travaille actuellement parle du besoin ou non d’enfant. Pour cela elle interroge au hasard des personnes avec une seule question : Pourquoi vouliez vous un enfant ?
Cette recherche documentaire se mélange rapidement à la vie secrète de son père en Ecosse.
Le style de Manon Fargetton est fluide et très agréable. Elle a la superbe idée de donner la narration à cette île écossaise où Maxine pense découvrir les secrets de son père.
Malgré la qualité du texte, des descriptions, des personnages, j’ai été dérangé par le parti pris de l’auteur sur la parentalité. Il me semble que la parentalité parle des mères et des pères. Là il n’est question que d’une vision féminine. C’est un choix de l’auteur que je n’apprécie pas. Dans ces interviews Maxine n’interroge que des femmes sur le besoin d’enfant. Qu’en est-il de l’homme. Quelle place ?
Il en ressort que faire un enfant n’est pas nécessaire actuellement. Vision réaliste ou pessimiste ?
Roman de l’identité qui se limite à une parentalité dans l’air du temps. Les couples se font et se défont, toutes les expériences sont bonnes.


A réfléchir
Lu dans le cadre du Livre 2025 de la Librairie Au bord du jour à Voiron (38) .Membre du Jury

Manon Fargetton vit dans le Morbihan et voyage dès qu’elle le peut, en particulier en Écosse. Après dix ans à partager sa vie entre la régie lumière au théâtre et ses romans, elle se consacre désormais à l’écriture. Si elle vient des littératures de l’imaginaire, elle a exploré de nombreux genres au fil des années. Elle a reçu le prix Imaginales pour L’Héritage des Rois-passeurs, le prix Renaudot des écoliers et le prix Chronos pour la série Les Plieurs de Temps, et Le Suivant sur la liste a été couronné par seize prix littéraires. En 2024, son roman Nos vies en l’air a été adapté en série par FranceTV. Tout ce que dit Manon est vrai, son premier roman de littérature adulte, a paru en 2022 et rencontré un grand succès. Ce que prend la mer est le deuxième.

Malu A contre vent de Clarence Angles Sabin. Le Nouvel Attila. 🟩🟩🟩◼️◼️

Malu à contre vent

Clarence Angles Sabin

Le Nouvel Attila

ISBN : 978 – 2-48774 – 929 – 0 Août 2025

192 pages

Avec ce premier roman, Clarence Angles Sabin nous entraîne dans les années 2010/2020 au coeur du Rouergue du plateau aveyronnais et au sein d’une bergerie et du monde rural.
Malu a dix ans et vit avec sont père et sa grand-mère a l’écart dans une bergerie, autour d’un paysage fait de trois collines dont celle où elle va enterrer les brebis mortes.
Malu est une jeune fille mal dans sa peau. Elle se scarifie, se sent harcelée à l’école.
Durant le temps du roman, sa grand-mère va petit à petit perdre la mémoire.
Le père est taiseux et vit de sa ferme. Sa femme qui venait de la ville , est partie après avoir donné naissance à Malu; dans l’impossibilité de s’intégrer à ce monde rural.
Malgré le style de l’auteur ( description magnifique et personnages rugueux) j’ai trouvé que ce roman voulait embrasser trop de thèmes.

Prenant un contexte rural ressemblant aux livres de Sandrine ColletteCécile Coulon ou Franck Bouysse, il ma semblé que le situer aux confins des années 2010 n’était pas réaliste. ce n’est qu’une impression.
J’ai lu que l’autrice avait souhaité écrire autour du mythe d’Antigone
La morale du mythe peut correspondre au livre : héroïne tragique devenue symbole de résistance. A contre-vent.
Antigone honorait son frère Polynice par des funérailles dignes. Ce n’était pas seulement un devoir familial mais un devoir divin.
Malu vit et revit cela avec l’enterrement de ces brebis. La vie contre la mort.
Livre noir.
Livre lu dans le cadre du « Livre 2025 » de la librairie Au bord du jour à Voiron. ( Jury)

Clarence Angles Sabin, vingt-huit ans, travaille dans l’édition de revues scientifiques. Originaire de l’Aveyron, elle est fille, petite-fille et arrière-petite-fille d’agriculteurs. C’est dans les paysages qui ont bercé son enfance qu’elle puise son inspiration et nourrit son écriture sensible et ombrageuse.

Nourrices de Séverine Cressan. Dalva. 🟩🟩🟩🟩◼️

Nourrices

Séverine Cressan

Dalva

ISBN : 978-2-48760 – 046 – 1 Août 2025

272 pages

Severine Cressan donne la parole à des femmes souvent invisibles ou de peu. Les nourrices. le roman n’est pas daté . On parle de Tour d’abandon, de charrettes, de maîtres de villes et de campagnes. le moyen âge, le 18 ou 19 -ème siècle ? Cela a peu d’importance en réalité.
Dans cette période non datée ni géographiquement située, Sylvaine qui vient de sevrer son fils Jehan va devenir nourrice d’un enfant de la ville, une petite fille nommée Gladie. Dans le même temps, elle va découvrir au milieu d’une clairière un bébé abandonné avec à côté de lui un carnet..
Sylvaine va donner son lait maternel à ses deux enfants. Malheureusement Gladie va mourir rapidement et Sylvaine et son mari Andoche vont substituer le bébé de la clairière à Gladie.
Cette substitution va bien entendu créer des péripéties.
Mais l’important n’est pas là. L’important est dans ces nourrices qui se battent pour les bébés, elles mêmes et leur liberté. Elles détiennent un trésor : la vie et le lait maternel. Elles sont pourtant invisibles et non reconnues. Elles sont de l’argent pour les hommes ,les ma8tres et les meneurs.
Nourrices raconte l’émancipation de ces femmes, leur recherche de liberté et la connaissance et reconnaissance de leur corps.
Sylvaine marche dans la forêt derrière la charrette conduite par le Meneur. Les femmes se font brinqueballées par le chemin.
Si Sylvaine marche derrière la charrette c’est que le Meneur a refusé sa présence. Alors Sylvaine marche derrière. Durant deux jours entre collines et forêts. Les femmes vont trouver toutes sortes de raison de ralentir la charrette pour que Sylvaine ne la perde pas de vue.
Et puis elles vont chanter et Sylvaine va suivre le chant. Et puis elles vont descendre l’une après l’autre de la charrette toujours en chantant.. Une chaîne, un lien qui devient un manifeste.
Livre lu dans le cadre du prix 2025 de la Librairie Au bord du jour à Voiron. ( Jury)

Séverine Cressan, née en 1976 dans la région lyonnaise, est passionnée depuis toujours par la littérature et la découverte de nouveaux horizons. Son amour des mots l’a conduite vers des études de lettres modernes et d’allemand puis au professorat. Elle a enseigné en France, en Allemagne et en Belgique. Elle vit aujourd’hui sur la côte Atlantique, au sud de la Bretagne.