Archives pour la catégorie Autobiographie

La nuit de feu d’Eric Emmanuel Schmitt. Albin Michel 💛💛💛

La Nuit de Feu par Schmitt

La nuit de feu est le livre de la révélation pour Eric -Emmanuel Schmitt. Il a mis 30 ans avant de l’écrire et de mettre des mots sur cette nuit dans le désert algérien.
A 28 ans Eric-Emmanuel Schmitt part faire un trek dans le Sud algérien et plus particulièrement à Tamanrasset et vers l’ermitage de Charles de Foucauld.
Durant cette randonnée il était prévu de gravir le mont Tahat , plus haut sommet du Hoggar.
Arrivé au sommet Eric-Emmanuel Schmitt décide de redescendre seul ce sommet et se perd.
Nuit seule dans ce désert du Hoggar et révélation de la nuit de feu.
Eric-Emmanuel Schmitt est confronté à l’infini , l’indicible , à la force.
De sa vie il y aura un avant et un après.
C’est cette césure , ce changement radical que nous raconte l’auteur.
Une nuit mystique , pas religieuse qui a transformé sa vie d’homme , de philosophe et d’écrivain.
Tout cela est écrit avec délicatesse , simplicité et profondeur d’âme.
Un joli et agréable moment de lecture et de réflexion

Le Goût du large de Nicolas Delesalle. Livre de poche 💛💛💛💛

Le goût du large par Delesalle

Dans de nombreuses critiques faites sur Babelio pour le goût du large de Nicolas Delesalle, revient la notion de récit de voyage. Je ne trouve pas que le livre soit un récit de voyage.
Sylvain Tesson quand il se pose en Sibérie , quand il revient de Moscou en moto ou encore quand il traverse les chemins noirs de la France nous fait un récit de voyage.
Nicolas Delesalle lui nous donne des fragments , des souvenirs de sa vie journalistique , des instants de ces reportages.
Si il y a un récit de voyage c’est un récit interne.
Et quoi de mieux qu’un porte container pour nous parler de lui.
Le porte container symbole de notre armoire à souvenir et émotion.
Tous ces containers colorés anonymes, juste marqués par une référence chiffrée qui vont d’un océan à l’autre avant d’être débarqués.
Ce long porte container , ces différents ponts , son équipage Multi-ethnique voguant au gré des océans. Un environnement spartiate , pas très stable.
C’est sur l’un de ces porte containers , le MSC Cordoba que Nicolas Delesalle va embarquer à Anvers pour atteindre Istanbul 9 jours plus tard.
Pendant 9 jours il va découvrir le goût du large. Mais pas le goût du largevécu lors d’une croisière avec cocktails , soirées dansantes et excursions dans des lieux paradisiaques.
Non il va découvrir le goût du large quotidien d’une dizaine de marins ayant laissés familles et proches pour travailler sur un porte container dont ils ne connaissent pas le chargement, mais dont ce chargement représente le monde économique actuel.
Le goût du large lors d’une croisière vous éloigne du monde ,dans une bulle de frivolité et de luxe surfait.
Le goût du large dans un porte container vous raccroche au monde.
Alors que l’on pourrait croire que ce voyage dans les flancs de ce bateau de fer et de rouille soit un enfermement , un moment hors du monde , et bien c’est tout le contraire.
Nicolas Delesalle est présent au monde et la pérégrination du MSC Cordoba est pour lui le moyen d’ouvrir ses containers d’émotion et de souvenirs.
Et l’ouverture de ces containers nous offre une écriture simple , émue , humoristique . Une écriture qui nous fait humer les embruns de l’Océan ,mais aussi les effluves de l’Afrique , de l’Asie ou encore l’humidité prégnante d’un coin du Causse Noir vers Millau.
Cette écriture nous fait entendre les cris , les détresses, les espoirs de ces pays , de ces peuples bordant la Méditerranée.
Comment ne pas être profondément touché par ce passage du porte container entre Tunisie et Sicile , « surfant sur une mer de cadavres  » alors qu’aujourd’hui l’Aquarius a toute les peines du monde pour trouver un port accueillant aux migrants.
Par tous les souvenirs de ces reportages , Nicolas Delesalle nous instille la réalité de notre monde contemporain.
Ce monde que nous ne souhaitons pas toujours voir . Un container anonyme , coloré, mais bien fermé dont nous voulons ignorer le contenu.
Le goût du large est un beau roman de vie.

La petite fille sur la banquise d’Adélaïde Bon. Grasset 💛💛💛

La petite fille sur la banquise par Bon

Qu’il est difficile de faire une critique sur le livre d’Adélaïde Bon La petite fille sur la banquise.
Ce livre qui nous parle d’attouchements sexuels, de viols, de pédophilie.
Ce livre touche à l’horreur et à l’indicible qu’à vécu , seule, cette petite fille sur la banquise.
On ne sort pas indemne de la reconstruction de la vie d’Adèlaide Bon.
C’est la reconstruction d’Adélaïde Bon après ces 9 ans , après ces actes ignominieux qui l’ont souillés à jamais
Cette petite fille est devenue Elle , comme -ci nous avions à faire à deux personnages qui ne se retrouvent pas.
Cette dualité est très forte et le regard que porte l’auteur sur ces deux personnages est d’une grande force émotionnelle.
Que la vie a du être forte pour faire face à toutes les réactions suite à ces attouchements et viols.
Que la vie a dû être dure pour retrouver une identité , un corps , un désir.
L’ensemble du livre d’Adélaïde Bon est magnifique , bouleversant.
Son cri de rage nous l’entendons, quand elle décrit la non prise en compte par les experts médicaux de ce qu’elle est, c’est à dire une victime.
Son cri de rage nous l’entendons quand elle dit qu’il n’y a pas de mot pour décrire les attouchements sexuels et le viol chez l’enfant.
Nous entendons son récit poignant du procès , nous sommes estomaqués , tourneboulés, émus au dessus de tous , par la litanie des témoignages sombres, terribles mais d’une force inimaginable. Nous touchons l’indicible.
Nous entendons sa révolte vis à vis des hommes et de l’humanité.
Et c’est parce que j’ai entendu tout cela et que j’en ai été touché, ému, questionné que je me permets de ne pas être en accord avec Adélaïde Bon quand elle dit : l’humanité toute entière est un enfant du viol, un enfant transi, sur la banquise, qui nous attend.
Je peux comprendre que vu ce qu’elle a vécu , et qu’elle ait au fond d’elle cette violence.
Mais résumer l’histoire de l’humanité a un viol me dérange quelque peu.