
Voici un premier roman trĂšs original. Cet opuscule de 120 pages tire son nom Ubasute, d’une tradition ancestrale japonaise qui voulait que l’on abandonne en montagne une personne ĂągĂ©e et malade..
Isabel Gutierrez va mettre en situation Marie , la maman malade et son fils Pierre.
Marie a conscience que sa derniĂšre heure approche.
Elle demande Ă son fils Pierre de la porter auprĂšs d’une roche et d’une grotte et de l’abandonner. LittĂ©ralement la porter dans une chaise sanglĂ©e sur le dos.
Ce sera pour Marie la derniĂšre fois qu’elle pourra parler Ă son fils.
Parler n’est pas le mot juste . C’est plus parler en silence.
« Puisque nous allons ensemble, mon fils, sans que nos regards se croisent, puisque c’est le moment du dĂ©part et celui des derniĂšres enjambĂ©es, Ă toi Ă qui j’ai appris Ă marcher et Ă pĂ©daler, je parlerai en silence, je calerai le rythme de ma langue sourde, marche de vers iambiques, Ă la longueur de tes pas . Nous traverserons le temps du paysage ensemble. » ( Page 28 )
Ce voyage intĂ©rieur sera l’occasion pour Marie de revisiter sa vie , que ce soit auprĂšs de ses grands parents, de son mari, de ses enfants.
Tout cela est écrit dans une belle langue poétique qui nous touche dÚs la premiÚre ligne par sa vérité et sa sincérité.
Chacun peut s’identifier Ă un enfant , un parent. Tout cela peut nous ĂȘtre trĂšs proche.
Reste néanmoins un sentiment de trop plein, comme si Marie devait tout revisiter. Et cela au détriment de la relation avec son fils.
Enfin quel poids fait porter ( au propre comme au figurĂ©) Marie Ă son fils qui est l’Ă©lu pour abandonner sa mĂšre.
L’Ubasute tradition japonaise peut elle ĂȘtre transposĂ©e telle quelle dans la sociĂ©tĂ© occidentale ?
Ces points abordĂ©s, le rĂ©cit d’Isabel Gutierrez demeure trĂšs fort et Ă©mouvant.
Un beau premier roman.

Isabel Gutierrez est une écrivaine française. Elle enseigne la littérature et le cinéma à Grenoble.