Le GoĂ»t du large de Nicolas Delesalle. Livre de poche 💛💛💛💛

Le goût du large par Delesalle

Dans de nombreuses critiques faites sur Babelio pour le goût du large de Nicolas Delesalle, revient la notion de récit de voyage. Je ne trouve pas que le livre soit un récit de voyage.
Sylvain Tesson quand il se pose en Sibérie , quand il revient de Moscou en moto ou encore quand il traverse les chemins noirs de la France nous fait un récit de voyage.
Nicolas Delesalle lui nous donne des fragments , des souvenirs de sa vie journalistique , des instants de ces reportages.
Si il y a un rĂ©cit de voyage c’est un rĂ©cit interne.
Et quoi de mieux qu’un porte container pour nous parler de lui.
Le porte container symbole de notre armoire à souvenir et émotion.
Tous ces containers colorĂ©s anonymes, juste marquĂ©s par une rĂ©fĂ©rence chiffrĂ©e qui vont d’un ocĂ©an Ă  l’autre avant d’ĂȘtre dĂ©barquĂ©s.
Ce long porte container , ces différents ponts , son équipage Multi-ethnique voguant au gré des océans. Un environnement spartiate , pas trÚs stable.
C’est sur l’un de ces porte containers , le MSC Cordoba que Nicolas Delesalle va embarquer Ă  Anvers pour atteindre Istanbul 9 jours plus tard.
Pendant 9 jours il va dĂ©couvrir le goĂ»t du large. Mais pas le goĂ»t du largevĂ©cu lors d’une croisiĂšre avec cocktails , soirĂ©es dansantes et excursions dans des lieux paradisiaques.
Non il va dĂ©couvrir le goĂ»t du large quotidien d’une dizaine de marins ayant laissĂ©s familles et proches pour travailler sur un porte container dont ils ne connaissent pas le chargement, mais dont ce chargement reprĂ©sente le monde Ă©conomique actuel.
Le goĂ»t du large lors d’une croisiĂšre vous Ă©loigne du monde ,dans une bulle de frivolitĂ© et de luxe surfait.
Le goût du large dans un porte container vous raccroche au monde.
Alors que l’on pourrait croire que ce voyage dans les flancs de ce bateau de fer et de rouille soit un enfermement , un moment hors du monde , et bien c’est tout le contraire.
Nicolas Delesalle est prĂ©sent au monde et la pĂ©rĂ©grination du MSC Cordoba est pour lui le moyen d’ouvrir ses containers d’Ă©motion et de souvenirs.
Et l’ouverture de ces containers nous offre une Ă©criture simple , Ă©mue , humoristique . Une Ă©criture qui nous fait humer les embruns de l’OcĂ©an ,mais aussi les effluves de l’Afrique , de l’Asie ou encore l’humiditĂ© prĂ©gnante d’un coin du Causse Noir vers Millau.
Cette écriture nous fait entendre les cris , les détresses, les espoirs de ces pays , de ces peuples bordant la Méditerranée.
Comment ne pas ĂȘtre profondĂ©ment touchĂ© par ce passage du porte container entre Tunisie et Sicile , « surfant sur une mer de cadavres  » alors qu’aujourd’hui l’Aquarius a toute les peines du monde pour trouver un port accueillant aux migrants.
Par tous les souvenirs de ces reportages , Nicolas Delesalle nous instille la réalité de notre monde contemporain.
Ce monde que nous ne souhaitons pas toujours voir . Un container anonyme , coloré, mais bien fermé dont nous voulons ignorer le contenu.
Le goût du large est un beau roman de vie.

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