
Dans mon billet sur le livre précédent de Nicolas Mathieu , Leurs enfants après eux, j’avais écrit ceci :
Par son écriture et son style, Nicolas Mathieu nous ancre dans la peau de ces personnages, dans cette vraie vie, loin de Paris et la mondialisation
C’est terre à terre, charnel, sans équivoque.
Une écriture populaire, des mots simples nous plongent au coeur de ces jeunes, de leurs parents
Aucun voyeurisme, juste l’envie de vivre, d’exister.
Nicolas Mathieu nous parle de la cité, des relations sociales, de nos rêves et utopies.
Il est toujours l’heure de croire.
Il est toujours l’heure d’un départ.
Et bien je peux reprendre les mêmes termes pour présenter le dernier roman de Nicolas Mathieu , Connemara.
On pourrait penser que Nicolas Mathieu fait de la redite.
Ce n’est pas du tout le cas .
Nicolas Mathieu creuse son sillon et approfondi ses thèmes de prédilections.
Derrière son réalisme, pointe surtout une justesse des situations.
D’abord il reste dans cette région du Grand Est qui est sa matrice, son terreau culturel et social.
Ce terreau fait d’un ancien monde industriel, sidérurgique, ouvrier. Ce terreau fait de villages , de bistrots , de collèges, de scooters, de bals , de villes périphériques. Ce terreau qui enlise aussi et qui empêche d’aller voir ailleurs.
C’était le cas dans Leurs enfants après eux.
Hélène et Christophe, personnages principaux de Connemara reprennent à leur compte cette réalité.
Hélène a tenté de s’extraire de Cornecourt cette ville périphérique de 15 000 habitants. Elle est partie faire des hautes écoles à Paris ou en province .
Elle s’est mariée, a eu deux enfants et travaille tout comme son mari Philippe dans une agence de consulting.
Christophe lui est resté à Cornecourt .
Il s’est marié, il a un garçon. Divorcé il est revenu vivre chez son père. Il sillonne les routes du Grand Est en tant que commercial vendant de la nourriture pour chiens.
Pour tous il reste une ancienne gloire de l’équipe de hockey d’Epinal.
Hélène et Christophe son au mitan de leur vie. La quarantaine va les happer et leur faire vivre une parenthèse
Le temps déjà des souvenirs de l’adolescence, de la jeunesse et de la vie qui file.
Que nous renvoie le miroir ?
Avec Nicolas Mathieu tout est question de miroir. le reflet dans le miroir est il réel, fidèle ou fait il apparaitre les fractures, les zones d’ombre. Qu’est ce qui est le plus important , le plus juste?
Ce jeu de miroir permet de croquer le monde des agences de consulting des Open Space face aux services publics , aux mairies.
Qui y a t il de plus kitch : s’éclater en groupe sur la musique des Lacs du Connemara de Michel Sardou , ou se trouver seul sur Tinder à se fabriquer un profil sexy ?
Nicolas Mathieu travaille la pâte humaine comme un artisan. Toujours le regard, le mot juste. Tous les personnages sont emplis d’humanité, de détresse mais aussi de la possibilité d’une île.
« Là -bas au Connemara
On sait tout le prix du silence
Là -bas au Connemara
On dit que la vie, c’est une folie
Et que la folie, ça se danse. »
» Comme avec une chanson de Sardou. Quand, dans un mariage, tout le monde se lève, chante à l’unisson et danse, c’est un phénomène humain puissant, épique et beau, qui mérite d’être rendu. « ( Nicolas Mathieu )