
Autant le dire en préambule : la lecture d’un livre de Patrick Grainville demande adhésion. Son dernier roman Les yeux de Milos ne déroge pas à la règle. Dans ce roman on retrouve trois des ingrédients habituels de Patrick Grainville.
D’abord le style : baroque parfois grandiloquent mais toujours ciselé, faisant honneur à la langue française.
Ensuite la peinture et les peintres. Comme dans La falaise des fous, auprès de Monnet, les Yeux de Milos nous entraîne dans les pas de Nicolas de Stael et de Pablo Picasso
Enfin, l’érotisme, la sexualité qui sont des thèmes récurrents des romans de Patrick Grainville.
Si l’adhésion à ses ingrédients n’est pas acquise, la lecture du roman peut devenir rapidement difficile voire ennuyeuse.
J’ai adhéré différemment aux trois ingrédients.
Plus la lecture du roman avance, plus la place de l’érotisme, pour ne pas dire d’une sexualité très crue, prend une place prépondérante. Tout est scruté, vu par le spectre des organes génitaux. A terme cette overdose donne la nausée et escamote ( le mot est gentil) une grande partie du roman .
Pourtant le point de départ du roman avec le regard bleu de Milos qui intrigue hommes et femmes, accroche le lecteur et donne envie de le suivre dans ses liens autour de Picasso, De Stael ou encore l’abbé Breuil. le style de Patrick Grainville nous transporte dans l’oeuvre de Picasso, dans les grands à plats de Nicolas de Stael, dans les terres ocres de Namibie ou dans l’humidité des grottes préhistoriques périgourdines ou niçoises.
C’est foisonnant, c’est instructif, c’est sensuel. …
Et puis peu à peu la sensualité devient érotisme de bas étage .
Je ne connais pas assez l’oeuvre de Picasso pour être objectif mais ne présenter la vie et l’oeuvre de Picasso que par ses oeuvres érotiques me paraît réducteur.
Bien évidemment la relation de Picasso avec ses femmes et compagnes est connue pour sa complexité et le caractère du peintre. Cela est rendu par Patrick Grainville mais pourquoi toujours revenir exclusivement aux organes, phallus, vulves et trous !
Ce parti pris phagocyte le roman et celui ci devient ennuyeux et interminable.
C’est tout de même un comble alors que nous sommes avec Picasso et De Stael.
Page 277 Patrick Grainville nous dit : » Que peut l’artiste ? Créer contre la destruction. Affirmer l’autonomie de son Soi, de son geste solaire. Épancher, chanter la création libre. C’est un soleil dans le ventre aux milles rayons. Voici la haute mission et le combat vivant «
Malheureusement je n’ai jamais ressenti cette allégresse dans Les Yeux de Milos.
Je l’avais pourtant ressenti dans La falaise des fous.