Les simples : Plantes médicinales utilisées telles qu’elles sont fournies par la nature.
A cette définition on peut rajouter une caractéristique des simples. Leurs formes , leurs couleurs ont souvent un rapport avec la maladie et l’organe à soigner.
SÅ“ur Clémence est la doyenne de l’Abbaye de Notre Dame du Loup dans l’arrière pays niçois . Elle est aussi l’herboriste de l’abbaye.
Nous sommes en 1584.
La médecine et la chirurgie en sont encore dans les balbutiements. Les soins sont généralement prodigués par les femmes et les religieuses. Elles ont la connaissance des plantes , des remèdes, des mixtures. Cette culture , ce savoir qu’elles divulguent gratuitement. Soigner, guérir ne peut être un acte mercantile.
Dans ce 16ème siècle générant découvertes et nouvelles connaissances , ce pouvoir des plantes, des bienfaits ne peut rester l’apanage des femmes.
L’abbaye Notre dame du Loup doit son indépendance à la faveur d’un roi. Et les soeurs bénédictines font fructifier leur indépendance.
Les préparations de SÅ“ur Clémence sont prisées jusqu’à la Cour du Roi et apportent une manne financière non négligeable à l’abbaye.
Normalement l’abbaye devrait dépendre de l’Évêché et lui reversé une grande partie de cette manne.
Le nouvel évêque Jean de Solines compte bien récupérer une grande partie de cette manne.
Il envoie donc deux vicaires à l’abbaye afin de trouver une faille , un défaut ou de provoquer un scandale.
On sait tous que lorsqu’on lance une pierre dans l’eau , elle fait des ronds et que l’onde de ces ronds s’étend à l’infini.
C’est exactement ce qu’il va se passer dans l’abbaye.
Dépassé par ses propres turpitudes, Jean de Solines va ouvrir la boîte de Pandore.
Et dans la boîte nous trouvons pèle mêle : pouvoirs – trahisons – diable et sorcellerie.
Le pouvoir et les trahisons sont également répartis entre l’abbaye et l’Évêché.
Avec grande maestria Yannick Grannec nous convie à vivre un an de cette déliquescence.
C’est écrit avec précision , humour , causticité.
C’est écrit avec légèreté et poésie quand il est question de donner la recette d’un remède.
C’est écrit avec dureté et crûment quand il s’agit d’évoquer la vie des soeurs converses ou encore les maladies, les procédés abortifs ou la sorcellerie.
C’est aussi un livre qui nous parle des femmes . Ces femmes qui ont eu un savoir naturel , maternel et que l’homme a détruit par l’Inquisition.
Ces hommes qui voyaient une part du diable dans les femmes.
D’ailleurs dans un traité inquisitoire , le Malleus Maleficarum il est dit que femina accouple fe et minus démontrant que la femme est armée d’une foi mineure à celle de l’homme.
Et dans ce roman Yannick Grannec ne fait que reprendre constamment la définition des simples. Sans doute parce que l’âme humaine est comme les simples : elle se désagrège, s’effrite et disparaît.
Personne , même une herboriste ne pourra capter » l’Âme fugace des simples , le souffle secret qui a placé le Créateur »
Les Simples est un livre addictif et jouissif.